Après Mombasa et Isle of Skye, le prolifique Alexander Pfister nous propose d’élever du bétail dans le Grand Ouest américain du XIXème siècle.
Parfois je me demande si Alexander Pfister ne mériterait pas le Nobel de la paix. Car si on regarde de plus près son parcours ludique, on remarque que lorsqu’il nous envoie en Afrique à l’époque coloniale (Mombasa), c’est pour travailler de concert avec les populations locales, et non pour les exploiter ou les réduire en esclavage. Même constat lorsqu’il nous propulse en Écosse (Isle of Skye). On y incarne alors un roux, afin de comprendre que derrière une couleur de cheveux contre nature, ils ne sont finalement pas si différents des gens normaux. Aujourd’hui encore avec Great Western, il nous emmène dans le Grand Ouest américain, non pas pour piller des diligences, pendre haut et court des bandits de grand chemin, violer des squaws ou étriper Geronimo, mais pour y élever des vaches comme un simple paysan normand.
En effet, à la tête d’un cheptel d’une quinzaine de bêtes à cornes, notre cow-boy va devoir traverser à plusieurs reprises l’état du Texas, afin de vendre son bétail au négoce de Kansas-City, et l’envoyer vers les villes avoisinantes. On se retrouve alors devant un titre aux mécaniques originales, empruntées aux jeux de placement, pose d’ouvriers et deck building, avec même un petit côté jeu de l’oie.

Jeu de placement, car les cases sur lesquelles les joueurs passent et s’arrêtent, sont posées au fur et à mesure des manches, chacun étant libre de construire un bâtiment sur un emplacement libre. Et si au départ, seuls quelques bâtiments neutres et une poignée de tuiles danger et camps indiens façonnent le parcours, très vite de nouvelles constructions vont venir le fleurir au gré des actions entreprises par les joueurs.
Pose d’ouvriers parce que les joueurs peuvent recruter des cow-boys, des ouvriers ou des ingénieurs, afin de respectivement acheter du bétail, construire des bâtiments ou faire avancer leur ligne de chemin de fer. En s’arrêtant sur la tuile correspondante, chaque joueur peut ainsi se rendre au Pôle Emploi du Grand Ouest Américain, pour y recruter un ou deux travailleurs, qui rejoint alors son exploitation, illustrée par son plateau individuel.

A cela vous ajoutez une histoire de train qui progresse sur une ligne de chemin de fer unique, permettant de réduire les coûts de livraison, mais proposant aussi des points de victoires à la clé et des bonus lorsque vous recrutez un chef de gare. Tout ça, plus quelques autres subtilités, confèrent à Great Western de très nombreuses possibilités de scoring… mais aussi un bon mal de crâne lorsqu’il s’agit d’expliquer les règles.
C’est d’ailleurs sans doute ce qui m’a un peu rebuté (en plus du thème pas assez présent à mon goût). Trop de possibilités nous sont offertes, et ce melting pot de mécaniques de jeu m’a un peu perdu en chemin. J’imagine qu’en persévérant, on finit par saisir ces petites subtilités qui vont nous faire exploser les scores, mais au départ on peine à décoller et c’est parfois très frustrant.
A trois ou quatre joueurs, avec du coup un plateau plus fourni, on gagne également beaucoup en intérêt. Mais pour moi qui joue essentiellement à deux, ça passe moins bien et les déplacements se font plus redondants. Alors attention, Great Western n’a rien d’un mauvais jeu, loin de là. Mais pour ma part j’ai tout de même très largement préféré Mombasa ou même Isle of Skye, du même auteur.