Pendant longtemps, la passion m’a poussé à craquer pour cet Inquisitor, la raison me rappelait que les jeux Warhammer sont souvent des purges. Définitivement, la raison m’a abandonné…
Sorti en juin 2018, Warhammer 40.000 Inquisitor: Martyr (qu’on va appeler Inquisitor, par souci de clarté) s’est depuis offert un bon gros patch 2.0, améliorant grandement l’expérience. Plus fluide, plus riche, mieux optimisé, cette mise à jour se veut un peu comme une sortie de bêta ou d’accès anticipé, tant les améliorations sont nombreuses et notables. Et si on regrettera que cet Inquisitor s’inscrive dans une longue lignée de jeux démoulés trop tôt, trop vite, il faut quand même saluer l’effort de suivi des développeurs qui n’ont pas hésité à remettre la tête dans le guidon pour permettre à leur titre de mieux coller aux attentes des joueurs et aux standards d’un hack’n slash moderne.
Alors, les efforts c’est bien, mais encore faut-il qu’ils soient payants. Et pour le coup, je ne m’amuserais pas à faire la comparaison entre les deux versions, puisque je n’ai pas connu les débuts du titre. De ce que j’ai vu ci et là dans les vidéos officielles et officieuses, il y a quand même eu de gros changements d’opérés et le tout va clairement dans le bon sens. Toujours est-il que le jeu reste, à mon avis, encore très (trop) oldschool dans sa réalisation et ses mécaniques, quand on le compare à des titres comme Diablo 3 (pourtant pas tout jeune) ou Path of Exile (pourtant gratuit). Mais commençons par le commencement :
La genèse
Au commencement, Dieu créa les cieux et la terre.
La terre était informe et vide: il y avait des ténèbres à la surface de l’abîme, et l’esprit de Dieu se mouvait au-dessus des eaux. »
Dieu dit : « Que la lumière soit. »
… et le Space Marine fut !
Si vous êtes profane dans l’univers de Warhammer 40K, sachez qu’en plus d’être un univers Sci-Fi particulièrement violent et bourrin, dérivé futuriste de la fantasy de Warhammer, il est également très connoté religion, tirant assez largement son inspiration du catholicisme moyenâgeux.
L’Imperium, regroupant l’essentiel de l’humanité, représente la plus grande puissance de l’univers. C’est aussi un régime religieux totalitaire et extrémiste, acquit à la cause d’un Empereur élevé au rang de divin, rappelant les sombres heures de la chasse aux hérétiques dans l’Europe de nos XIème et XIIème siècles… ou de la Manif pour Tous au XXIème.
Inutile toutefois de connaître cet univers sur le bout des doigts pour goûter aux plaisirs de l’annihilation de démons dans Inquisitor, mais les longs et nombreux textes et dialogues risquent bien de vous perdre si vous êtes totalement novice et/ou réfractaire en la matière.
Ici, vous incarnez un inquisiteur, à choisir parmi trois classes, Croisé, Assassin et Psyker, et leur trois sous-classes associées. Tout débute par votre débarquement sur le Martyr, un gigantesque vaisseau cathédrale soudainement sorti du Warp (une dimension parallèle démoniaque) après avoir été perdu durant des années. Rapidement, et alors que les cadavres s’amoncellent au rythme de votre exploration du vaisseau, le mystère autour du Martyr va s’épaissir, au point que vos sacro-saints supérieurs vont vous monter en grade, élever vos droits et vous laisser carte blanche pour enquêter jusqu’aux confins de la galaxie. Le message est clair : Vous êtes investi d’une mission divine, et rien ni personne ne doit entraver votre chemin. Pour un inquisiteur, cela se traduit par réduire en charpie des démons et parias en tous genres à tour de bras. Et si en plus, l’un d’eux vous lâche une info intéressante dans son dernier souffle, c’est que du bonus ! Bref, si vous cherchiez de la subtilité, vous vous êtes fourré le blaster dans l’oeil.
En soit d’ailleurs, l’histoire n’est pas inintéressante, et la portée religieuse de l’univers de Warhammer 40K n’est pas pour me déplaire. C’est même ce qui lui confère son originalité. D’autant que pour rassurer les moins croyants d’entre vous, il n’est jamais question ici, de glisser des messages catho subliminaux, comme ça peut être le cas parfois avec certains jeux américains. Malheureusement, aussi intéressant que soit le scénario, il est plutôt mal mis en scène, avec de nombreux textes rébarbatifs à lire, des dialogues en anglais qui ont parfois lieu pendant l’intensité des combats (mieux vaut être anglophile, même si c’est sous-titré donc) et une scénographie réduite à son strict minimum : Votre héros statique sur la map, et un personnage qui vient vous parler dans une petite fenêtre s’ouvrant dans le coin supérieur de l’écran. Et si on peut encore l’accepter en mission, c’est autre chose lorsqu’on revient au calme sur son vaisseau, et qu’il n’y a aucun effort de mise en scène ou de gestuelle pour donner un peu de vie à tout cela. On a vu plus moderne et engageant. Heureusement, quelques cinématiques plutôt jolies viennent parfois ponctuer l’aventure, pour nous remettre les pieds à l’étrier.
Le bûcher des vanités
Tout ça fait très daté, et malheureusement le gameplay n’est pas épargné par ce constat. En effet, chacune de vos missions vous enverra sur une map relativement petite, à l’environnement futuristico-gothico-gore assez réussi, mais un poil redondant lorsqu’on enchaîne les missions. A l’heure de l’open world et du gigantisme, ça fait un peu tâche ; d’autant que chacune de ces missions passe par un interminable écran de chargement au préalable. On appréciera tout de même que les éléments du décors y soient destructibles, d’autant qu’ils servent de cover tant pour vos ennemis que pour vous-même. Bon, vu qu’il est nécessaire de s’acharner dessus pour les voir voler en éclats, en pratique ça n’a qu’assez peu de conséquences, mais l’intention est louable.
Côté mécaniques de jeu, il est plutôt intéressant de pouvoir alterner entre vos deux sets d’armes à la volée (moyennant un cooldown de vos compétences), permettant ainsi de passer de la longue à la courte distance en un clin d’oeil, par exemple. C’est d’autant plus pratique, voire salvateur, que la barre de compétences n’est pas ce qu’on a vu de plus fournie. Ces compétences sont en effet liées à l’équipement que vous portez (qui sont eux-même liés à votre classe, d’ailleurs), et vont de deux à quatre pour les armes (2 si vous portez deux armes différentes dans chaque main), une pour votre équipement (grenade, bouclier, etc.) et une compétence spéciale d’armure (invisibilité, clones, etc.).
Et puisqu’on parle de classes, on regrettera d’ailleurs leur faible nombre et, surtout, le fait qu’il n’y en ait véritablement qu’une pour illustrer le Space Marine dans toute sa splendeur et toute sa violence ; ou du moins l’image que j’en ai, en bon gros fan de Space Hulk. En effet, seul le Croisé fait figure d’armoire normande, dans sa grosse et rutilante armure. Le Psyker fait un peu trop mage en robe et l’Assassin est une sorte de Catwoman du turfu, en habit de latex. D’ailleurs, étant un fervent habitué des avatars féminin (une tradition chez moi, depuis Zoey de Left 4 Dead), j’aurais aimé pouvoir jouer une Sœur de Bataille, qui n’ont rien à envier aux mecs en matière de badasserie, plutôt que d’être contraint et forcé de me rabattre sur une Assassin, svelte et (presque) discrète.
Les tables de la loi
Côté interface, si l’inventaire se veut très classique (pour ne pas dire archaïque), les différents arbres de compétences et les aptitudes à débloquer au moyen d’actions héroïques (trois aptitudes max), promettent de longues, très longues heures de jeu et un endgame savoureux pour qui aime peaufiner son personnage jusque dans les moindres détails. En effet, ce n’est pas moins de 18 arbres de compétences qui sont proposés, qu’il faudra au préalable débloquer via des actions de jeu (tuer X ennemis au blaster pour débloquer les compétence à distance, par exemple), avant de pouvoir dépenser ses points d’XP dans des bonus nombreux, variés et plutôt pointus. En sus donc, le jeu vous proposera d’affiner votre héros/héroïne via 3 aptitudes spéciales, elles aussi à débloquer au moyen « d’actions héroïques » (des succès), et des paliers dans les trois attributs Précision, Survie et Sanguinaire. Bref, il y a clairement de quoi se creuser les méninges pour monter sa build dans la voie qu’on souhaite emprunter.
De plus, outre les missions principales (mal) scénarisées, il est possible à tout moment d’effectuer des missions annexes aux quatre coins de la galaxie. En effet, une grande liberté vous est laissée pour naviguer entre les différents systèmes solaires, afin de vous attaquer à telle ou telle planète. Il faut juste vous assurer en amont que le challenge n’est pas trop relevé pour le niveau de votre personnage. Il vous est même possible d’utiliser des Tarots d’Uther, des cartes de tarot qui accroissent la difficulté, en offrant en contrepartie des bonus d’XP, de loot ou de matériau récolté. A l’arrivée, chaque galaxie sécurisée vous rapportera alors des bonus supplémentaires, en fonction du niveau de pacification de la zone.
Bref, de par son univers et toutes ses petites singularités, le jeu n’est pas désagréable à jouer en soi, loin de là. Il peut même se jouer jusqu’à 4 en coopération, ce qui doit le rendre encore moins désagréable (moi mes amis sont soit pauvres, soit aux goûts douteux, je n’ai donc pas pu tester le coop). Pourtant, son petit côté vieillot joue clairement en sa défaveur lorsqu’on se retrouve devant son écran à se demander quoi lancer aujourd’hui. D’autant plus si on le compare aux cadors de la discipline, Path of Exile et Grim Dawn. Dès lors, ce Warhammer 40.000 Inquisitor: Martyr entre dans cette catégorie de jeux sur lesquels on prend beaucoup de plaisir, mais qu’on est paradoxalement toujours réticent à lancer. Quoi qu’il en soit, c’est sans doute l’une des meilleures adaptation de la licence Warhammer 40K, et un très bon hack & slash pour ne rien gâcher. Donc si vous êtes fan de l’univers, il n’y a pas beaucoup d’hésitations à avoir.