Attendu comme le messie par les inconditionnels du jeu de rôles, The Witcher 2 n’est peut-être finalement pas aussi ultime qu’on l’espérait.
Adapté sur PC
Ces derniers temps, j’avais tendance à être plutôt indulgent avec les jeux dont je faisais la critique. Non pas que ces derniers ne méritaient pas les éloges que je leur faisais, mais disons que je passais souvent outre leurs quelques défauts pour me concentrer sur leurs qualités. Or, cette fois-ci j’ai bien envie d’être un peu plus sévère avec The Witcher 2. Non pas qu’il s’agisse d’un mauvais jeu, bien au contraire c’est un excellent RPG, sans doute l’un des meilleurs sortis ces dernières années. Mais voilà, à force de nous faire rêver avec des présentations du jeu, plus sexy les unes que les autres, le retour à la réalité a parfois un goût amer. Déjà, son premier défaut c’est de sortir sur PC en exclusivité (certes provisoire puisqu’une version 360 devrait débarquer d’ici la fin de l’année). Là je sens que les PCistes intégristes avec leurs nappes IDE en boucles d’oreilles et leur prise USB anale vont me hurler dessus, mais voilà quoi… quand on vous montre un jeu d’une beauté renversante et qu’au final, vous vous retrouvez à jouer à un titre qui à cinq ans de retard graphiquement parce que votre machine ne peut pas le faire tourner correctement, ça vous refroidit un homme. Et comme je ne suis pas un PCiste intégriste (et qu’en plus je suis pauvre), je ne suis pas de ceux qui se rachètent une config’ à 2.000 boules juste pour jouer à un jeu (ni de ceux qui font croire à leurs parents qu’ils ont besoin d’un quadruple cœur avec deux cartes graphiques pour faire des tableaux Excel). Bref, c’est toujours la même rengaine : Une minorité profite de l’avance technologique du PC de riche sur les consoles, pendant que la grande majorité subit la décennie de retard du PC de pauvres sur les consoles.
M’enfin qu’importe, au moins il tourne, c’est le principal. Et même si je ne peux pas compter les poils blancs qui ont élu résidence dans les narines de Geralt, contrairement à beaucoup d’autres, je peux y jouer, et sans que ça me pique trop les yeux… je ne vais pas me plaindre. Seulement voilà, comme beaucoup d’autres titres avant lui, et contrairement à son prédécesseur, The Witcher 2 est un jeu console qu’on sort sur PC (décidément, je vais faire copain/copain avec les PCistes talibans aujourd’hui). Et comme c’est la première incartade de CDProjekt dans l’univers console, cela se fait dans la douleur. Moi ce qu’on m’a toujours appris, c’est que quand tu proposes un jeu pour ordis, tu te dois de balancer des tonnes de raccourcis clavier… histoire de rentabiliser l’onéreuse greffe de douze doigts que certains joueurs se sont offerts à Noël dernier. Bah pour The Witcher 2, dans ton cul les raccourcis clavier ! Tout se passe via une roue accessible par pression d’une gâchette (si on joue au pad) ou de je ne sais plus quelle touche (pour les inconditionnels du combo clavier/souris… inutile ici). Et si cette roue ralentit considérablement le temps pour vous laisser choisir votre sort, signe et/ou arme, elle n’en est pas moins pénible à l’usage. Notamment lorsqu’il faut sélectionner un signe et qu’on ne se rappelle plus forcément quels effets a chacun d’entre eux.
Des bâtons dans les roues
Mais cette roue est un exemple génial et novateur à côté de l’inventaire que nous a pondu le développeur. Ne cherchez pas, même dans vos plus lointains souvenirs lorsque vous jouiez à une sombre bouse perdue dans les années 90, jamais vous n’avez vu et ne verrez inventaire plus merdique et inconfortable que celui de The Witcher 2. Même en voulant le faire exprès pour faire chier ces sales cons de joueurs, il était tout bonnement impossible d’arriver à un résultat aussi médiocre. Et pourtant, CDProjekt s’est transcendé sur le coup, et a réussi là où les développeurs les plus minables ont tous échoués jusqu’à présent : Ils nous ont pondu l’inventaire pourri ultime ! Celui où c’est tellement le bordel que tu ne comprends rien, pas même où se trouve ton curseur. Celui qui est blindé ras la gueule de formules d’alchimie à la con, où pour lire leurs effets et obtenir la liste des ingrédients nécessaires à leur concoction, tu dois t’arrêter une plombe sur chaque le temps que le texte défile à l’écran. Non vraiment, je voulais tirer un grand coup de chapeau aux développeurs, car atteindre un tel niveau de misérabilisme relève de la prouesse, du génie pur. C’est bien simple, c’est la toute première fois en quasiment trente ans de vie de joueur, que j’ai pensé à arrêter à cause d’un inventaire. M’enfin, on finit par s’y résigner, avant qu’une autre tare, plus problématique encore, vienne achever la motivation qui vous restait. Cette tare, c’est la difficulté. Car sachez-le, The Witcher 2 est dur… mais quand je dis dur, je veux dire vraiment dur. Au point que vous vous sentez obligé de sauvegarder toutes les deux minutes.
En effet, ici pas question de button masher comme un neuneu. Tout est question de timing entre les coups horizontaux et verticaux, la garde et les contres, la gestion des signes et l’utilisation abusive des roulades. Ces techniques sont essentielles, vitales, pour survivre aux affrontements qui vous mettent très régulièrement aux prises avec une demi-douzaine d’ennemis acharnés minimum. Elles sont d’autant plus vitales que pour boire des potions, vous devrez au préalable méditer à l’abri des ennemis. Impossible donc d’en ingérer une en vitesse en plein milieu d’une rixe. Si votre jauge de vie descend dangereusement, la seule façon de s’en sortir est alors d’éviter les coups, voire de fuir. Mais bon, à une époque où le jeu vidéo ne se résume qu’à une succession de QTE chiants comme la mort, on ne va quand même pas se plaindre d’avoir un peu de challenge, non ? Seulement voilà, si les premières heures de jeu vont mettre vos nerfs à rude, très rude épreuve (d’autant plus que le long prélude censé faire office de tuto nous laisse paradoxalement assez seuls avec nous-même, sans véritable aide pour appréhender les combats correctement), une fois la magie acquise et votre arborescence de compétences un minimum étoffée, le jeu devient carrément facile (à deux ou trois exceptions près). Un peu comme si vous aviez joué en mode légendaire pendant trois heures, avant de passer en mode facile subitement parce que vous galériez trop. C’est frustrant, car un coup vous galérez, un coup vous vous baladez… il n’y a pas de juste milieu.
Qui aime bien châtie bien
Ajoutez à cela quelques défauts plus « mineurs », mais pas forcément moins pénibles, comme les combats à mains nues basées sur de simples QTE (encore eux !), quelques transitions foireuses dans les dialogues, une carte aussi moche que peu pratique, et une gestion calamiteuse du loot. Ah oui, le loot… j’ai failli ne pas en parler, mais il vaut le détour lui aussi. Car pour récupérer les objets sur les cadavres de vos ennemis, il faut d’abord que plus aucun d’entre eux ne soit dans les parages, puis que Geralt attende une bonne trentaine de secondes histoire de se calmer les nerfs, avant, ENFIN, de pouvoir ramasser l’objet par terre, représenté par une petite bourse marron qui nécessite d’avoir 12 sur 10 à chaque œil pour la repérer au sol. Là encore, en matière d’idée foireuse, c’est du high level… même feu-Davilex ne peut pas test ! Mais bon, je tape, je tape, je tape, toutefois comme le disaient si bien les philosophes Début de soirée, c’est ma façon d’aimer. Car malgré tout, on ne peut s’empêcher de kiffer la vibe avec Geralt, tant l’univers de The Witcher est riche, sombre et profondément mature. Alors oui, je sais que les journaleux (pros ou amateurs) ont tendance à faire le coup de l’histoire mature à tout bout de champ, dès qu’on a affaire à un personnage principal un tant soit peu anti-héros. Mais ici, l’univers imaginé par Sapkowski est véritablement passionnant et résolument adulte (et pas seulement parce qu’on voit des nichons ou que les dialogues sont crus), tournant autour des sempiternelles luttes de pouvoirs auxquelles le genre nous a habitué, mais aussi autour de thèmes qui nous sont plus familiers, comme le racisme ou le terrorisme.
On est d’autant plus absorbé par ce monde, qu’on le voit vivre autour de nous. Les PNJ s’affairent à leurs tâches quotidiennes avec un naturel assez bluffant, et courent même se mettre à l’abri dès que la pluie fait son apparition. Des conditions météorologiques qui ne sont d’ailleurs pas seulement là pour l’esthétisme, mais ont également une influence sur le gameplay et notamment la magie, puisque les sorts de foudre seront beaucoup plus efficaces lorsque la flotte nous tombe sur le coin de la gueule que lorsqu’il fait beau. Les dialogues sont savoureux, les personnages généralement charismatiques et l’histoire passionnante, même s’il est préférable d’avoir goûté au premier épisode pour en saisir toutes les subtilités. Bref, beaucoup de conditions sont là pour faire de The Witcher 2 une référence du genre. Seulement voilà, le plaisir incommensurable que procure parfois le jeu est toujours contrebalancé par la déception et la frustration. Peut-être avais-je trop d’attentes à son encontre, peut-être que je le voyais un peu trop comme le RPG ultime qui me réconcilierait avec un genre qui peine à évoluer dans la bonne voie (comme la grande majorité des genres d’ailleurs). Au final, ce n’est pas la référence attendue, juste un excellent jeu. D’aucuns me diront que c’est déjà pas mal, mais je ne peux pourtant pas m’empêcher d’être déçu. Espérons que la version 360 qui arrive saura corriger le tir et ne se contentera pas de simplement s’adapter au support.
Il se dégage une ambiance assez unique dans The Witcher, qui nous permet de nous accrocher pour profiter des innombrables qualités du soft en occultant ses non moins nombreux défauts.
9 Commentaires
The Witcher 2, entre jouissance et frustration
Les défauts dont tu parles (inventaire, loot…) étaient déjà présents dans le 1 et perso je n’avais pas eu le courage de le terminer, en grande partie à cause de ça. Et aussi de la gestion de la caméra. Et aussi parce que c’était globalement trop compliqué, et parce que les temps de chargement me gonflaient. Pourtant j’ai un gros pc de 25cm.
The Witcher 2, entre jouissance et frustration
Là y a quasiment pas de temps de chargement… par contre sur 360, je crains le pire à ce niveau là.
The Witcher 2, entre jouissance et frustration
Y a du cul dedans, ça devrait vous faire passer au-delà de tous les défauts 😀 (Spéciale dédicace)
The Witcher 2, entre jouissance et frustration
Ca date un peu mais j’ai commencé TW2 il n’y a pas si longtemps et j’ai aussi recu cette difficulté en pleine face, j’ai tendance à tester les jeux et les revendre parfois avant même de les avoir finis, les rusher juste pour voir ce qu’il ont dans le ventre, a l’épée comme un bourrin … Mais ce n’est pas comme ca que ca se joue, tout simplement.
Après le test reprend calmement, en te mettant dans la peau du personnage (la profondeur est comparable mais on est quand même loin du Skyrim ou il suffit de foncer tete baissée en appuyant sur F5), il faut se cacher, poser des pieges, utiliser les pouvoirs adaptés au monstre et à la situation, traquer ses proies, perseverer, s’améliorer au pad, être attentif comme un vrai rodeur et pas un paladin. C’est un VRAI RPG et ca en handicapera plus d’un mais au moins les victoires se mériteront!
The Witcher 2, entre jouissance et frustration
Bah moi mis à part les 2 premières heures de jeu je ne l’ai pas trouvé si difficile que ça. Bien moins que le premier en tout cas.
The Witcher 2, entre jouissance et frustration
C’est parce que t’es trop fort
The Witcher 2, entre jouissance et frustration
Il n’est pas difficile, ce sont justement ces deux premières heures qui le sont… avant que tu ne débloques les pouvoirs.
C’est justement ça qui est un peu con je trouve. Au début, c’est super dur et une fois que tu débloques tes pouvoirs, ça devient trop facile. Bon, l’avantage c’est que tu sens bien la montée en puissance, mais ça gâche un peu de ne pas avoir une difficulté progressive.
Et puis toi tu l’as fait sur 360, non ? C’est peut-être plus facile sur consoles… 😀
The Witcher 2, entre jouissance et frustration
Personnellement, je ne le trouve pas vraiment difficile et le niveau graphique ainsi que l’histoire sont d’énormes points positifs par rapport au premier opus. Là où ça coince VRAIMENT c’est tout le système inventaire/carte/quêtes…. Personne n’en parle du journal de quête?
Sérieusement! alors oui, c’est cool, c’est bien écrit, on est plongé dans l’histoire mais… Mais bordel! pas d’objectif clair, pas de récap… faut tout relire à chaque fois qu’on est paumé! Je crois que l’inventaire on peut s’y faire mais CA???!!! Ils se rapprochent du livre en rendant le jeu injouable. C’est mon ressenti.
Pourtant tous ces aspects étaient très bien gérés dans le 1, l’inventaire et le bestiaire étaient bien fait (le bestiaire c’est la base quand même pour un sorceleur merde), le journal des quêtes était clair, NET, et presque précis…. Ils auraient pu suivre l’exemple du 1 et ajouter, pour les puriste, un journal plus narratif des quêtes entres l’onglet « personnages » et l’onglet « bestiaire » et paf, un jeu beau ET jouable (pour un jeu, l’essentiel c’est quand même d’être jouable non?)
The Witcher 2, entre jouissance et frustration
Une série dont le gros point noir restera le game design, et ce, depuis le début. En dehors de l’écriture, ça a toujours été moyen, voire médiocre. Le 2 est le plus mauvais et le 3 le meilleur… mais je n’aurais pas atteint Skellige si les persos et les dialogues n’avaient pas été de qualité. Un jeu bien trop surestimé pour ma part et loin derrière un New Vegas ou un Divinity Original Sin 2 dans un autre genre (surtout pour la liberté d’action).