Incarner un expert en assurance dans un jeu d’enquête, sur un bateau au début du XIXème siècle, porté par des graphismes monochromes, c’est super vendeur, non ?
Sorti sur PC l’an passé, j’ai profité de son adaptation consoles, et notamment Switch, pour découvrir enfin le tant acclamé Return of the Obra Dinn. Il s’agit ici du nouveau jeu de Lucas Pope, à qui on doit le déjà très acclamé Papers, Please (auquel, perso, je n’ai pas accroché). On y incarne un inspecteur en assurance de la Compagnie Britannique des Indes Orientales, chargé d’enquêter sur le mystère qui entoure l’Obra Dinn. Ce navire marchand disparu en 1803, est en effet réapparu comme par magie quatre ans plus tard, en 1807, avec semble-t-il aucun survivant parmi les 60 membres d’équipage embarqués. Mais que s’est-il passé ? C’est à vous de le découvrir…
Pour ce faire, vous ne pourrez compter que sur un curieux manifeste de bord, pratiquement vierge, et sur une non moins étrange montre gousset, capable de remonter le temps. Le précieux carnet est composé d’un plan du navire, de la liste des personnes à bord et d’un croquis, véritable photo de famille de toutes les personnes embarquées. Le reste des pages est vierge, et se remplira au fil de vos découvertes.
La montre gousset quant à elle, est capable, en présence d’un cadavre, de remonter le temps pour illustrer en trois dimensions, le dernier instant du défunt. Et j’insiste sur le singulier, car c’est vraiment l’instant T de son dernier souffle. Une photographie en trois dimensions, dans laquelle vous allez pouvoir vous déplacer pour observer et analyser le moindre détail de la scène. Ainsi, en découvrant de nouveaux cadavres, vous pourrez passer d’une séquence à une autre, jusqu’à retracer l’intégralité des événements qui auront provoqué la fin de l’Obra Dinn.
Toutefois, si retracer ces événements s’avèrera finalement plutôt simple, la véritable difficulté va être de définir l’identité de chacun, quel fut leur destin et qui le provoqua. Car c’est de ces déductions que découleront les assurances qui seront versées à leurs familles respectives. Pour certains d’entre eux, ce n’est pas bien compliqué. Au fil des séquences, vous récolterez des informations précieuses, et toutes les trois déductions correctes, le jeu vous en informera et vous confortera donc dans celles-ci. Bref, vous avancerez bon train jusqu’à ce que le matelot vous ayant amené jusqu’au navire en barque, vous enjoint à rentrer pour cause d’avis de tempête. Si vous n’avez jamais rien lu sur ce jeu (et donc, ne lisez pas ces lignes), vous découvrirez ainsi que votre premier run vient de se terminer, brusquement, et que vos piètres résultats n’ont pas de quoi vous rendre fier.
C’est là, au début de votre 2ème run, que vous comprenez que l’unique observation des scènes ne vous amènera pas bien loin. Pour relever ce défi, il va falloir davantage faire jouer vos méninges, voire prendre des notes ; ce qui parait aberrant pour un jeu vidéo en 2019 (ou 2018 pour la version PC). Vous devrez faire des déductions en associant la liste des membres d’équipage au croquis, étudier la chronologie des événements sur la carte du navire, faire plus attention aux détails, aux accessoires, aux vêtements, à qui occupe quelle cabine, etc. Pour chacune des scènes que vous allez découvrir, le sujet principal (la victime), devient presque secondaire.
Return of the Obra Dinn s’avère être un jeu diablement original, de par ses sublimes graphismes monochromes 1-bit qui rappellera aux plus anciens d’entre nous, nos vieux jeux sur disquettes 5 ¼ pouces, mais aussi par ses mécaniques et la réflexion qu’il nous pousse à avoir pour avancer. Le seul reproche que je pourrais lui faire, c’est son principe de validation toutes les trois déductions, certes vital pour progresser, mais qui peut parfois nous tenter à quelques propositions hasardeuses. Une franche réussite, qui ne plaira toutefois sans doute pas à tout le monde (j’en connais au moins un qui est allergique aux enquêtes maritimes).