Acheté Day One puis très vite lâché, je me suis récemment replongé dans Gears of War 4. Alors, le gamin marche-t-il sur les traces de ses illustres parents ?
Genèse d’une référence
En 2006, lassé de faire des jeux exclusivement multijoueurs, le studio Epic Games troquait ses Unreal Tournament pour sortir un jeu d’action un peu bourrin, jouable seul ou à deux en coopération, en exclusivité sur la Xbox 360. Le succès fût immédiat et ravagea tout sur son passage, redessinant les mécaniques du TPS et détrônant presque le Masterchief et la saga Halo dans la hiérarchie des blockbusters Xbox. Trois épisodes plus tard, Epic mit un terme à son Gears of War et à la trilogie consacrée à Marcus Fénix. De là à ranger la licence au placard ? C’était sans compter sur l’appétit de Microsoft qui, en 2013, confia le développement d’un spin-off à People Can Fly (Gears of War: Judgment), le studio derrière Painkiller et Bulletstorm, avant de racheter la licence en 2014. Dès lors, le constructeur américain débaucha le producteur exécutif de la première trilogie chez Epic, et le propulsa à la tête du studio Black Tusk, rebaptisé The Coalition et désormais exclusivement voué à cette licence. Ce studio nouvellement crée se fît alors les mains sur le remake Xbox One du premier épisode avant de plonger dans le grand bain avec le Gears of War 4 qui nous intéresse ici. Voilà pour l’historique.
Et moi dans tout ça ? En bon fan Xbox de la première heure, j’avoue avoir un faible pour cette licence. Déjà parce que j’y ai passé d’excellents moments en coopération et que je garde quelques souvenirs impérissables de ces parties entre potes. Ensuite, parce qu’il n’a pas son pareil pour caresser dans le sens du poil, nos penchants les plus inavouables. Car Gears of War c’est violent, sanglant, bourrin à souhaits, et je n’ai pas honte de le dire : J’aime découper du locuste à la tronçonneuse ou leur exploser la tronche à coup de latte, lorsqu’ils gisent au sol. Au-delà de ça, j’apprécie surtout l’atmosphère unique qui s’en dégage, mêlant différents genres et univers. L’architecture médiévale faite d’imposants édifices en pierre brute et de statues de chevaliers en armure. L’histoire d’anticipation avec ses armées futuristes qui ne tombent pas dans la science-fiction pure, à base de lasers qui font « piou-piou ». L’univers fantasy avec ses créatures en tous genres, humanoïdes ou bestiales. Et une ambiance qui flirte parfois avec le film d’horreur. Même les personnages principaux, avec leur démarche lourde et leur carrure d’armoire normande, n’ont guère d’équivalent, si ce n’est peut-être du côté de la licence Warhammer 40k et ses space marines. C’est d’ailleurs sans doute cette lourdeur qui déplaît le plus aux détracteurs de cette licence. C’est un parti pris osé, qui assume son côté bourrin et colle parfaitement à l’ambiance et à l’univers du jeu. Personnellement j’adore.
Talkin ’bout my generation
Avant d’entrer enfin dans le vif du sujet, je termine avec un dernier aparté, afin de vous informer que je ne vous parlerais ici que du mode Campagne. J’ai très peu joué aux modes en ligne et au mode Horde : Ils ne m’intéressaient guère dans la première trilogie, ils ne m’intéressent pas plus aujourd’hui. A priori, de ce que j’ai pu tester brièvement et de ce que j’ai pu lire ci-et-là, il s’agit du meilleur multi de la série. Ses adeptes ne devraient donc pas être déçus… Mais revenons-en à nos moutons : L’histoire de Gears of War 4 nous plonge 25 ans après le troisième épisode. La guerre est terminée, les locustes vaincus et le monde se reconstruit peu à peu. Dans cette nouvelle vie qui s’offre à l’humanité, la CGU règne en maître avec ses armées de robots, quitte à passer pour un despote en intimant aux populations de se regrouper en ville afin de mieux les protéger. Parce que les chiens ne font pas des chats, le fils de Marcus, James Dominic Fenix (alias JD), et son acolyte Delmont Walker, ont déserté l’armée et ont rejoint un groupe de rebelles, installé en pleine campagne. De là, ils font la nique à Jin et son armée de Defbots, dans une petite guéguerre d’égo qui va vite tourner court, pour laisser place à un conflit bien plus inquiétant, face à un ennemi inconnu : La vermine.
Encore puceau du Locuste, JD va vite courir dans les jupons de son père, afin de profiter de son expérience en matière de bestioles hostiles. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que les années n’ont pas altéré le charisme d’un Marcus Fenix, plus que jamais au sommet de sa forme. Il crève d’autant plus l’écran que les petits nouveaux n’ont rien pour eux. JD a une aura de poulpe sur un étal de poissonnier et Delmont endosse le rôle du petit comique de service dont les vannes tombent toujours à plat. Seule Kait s’en sort avec les honneurs, avec son joli minois, son attitude de garçon manqué et sa détermination à sauver sa mère, quitte à en découdre avec une armée entière. Clairement, ces trois héros propres sur eux, avec leurs gueules d’anges de fils embourgeoisés, tranchent avec les Marcus, Dominic, Baird et Cole de l’ère Epic. Espérons que l’avenir sombre qui les attends saura leur sabrer le moral et buriner le visage comme il faut, afin qu’ils gagnent en maturité et en crédibilité dans les prochains épisodes.
Mater l’Essaim
Fort heureusement, les héros ne sont pas les seuls à avoir changé : Les ennemis aussi. Et pour le coup, c’est avec bien plus de réussite. Si les drones n’auront rien de bien différents de leurs homologues locustes, ni dans leur look, ni dans leur attitude, on retrouve en sus, toute une batterie de nouvelles bestioles promptes à vous mettre en difficulté. Ces nouveaux ennemis ont d’ailleurs pour dénominateur commun, de vous forcer à être constamment en mouvements. Ainsi, si la première trilogie avait tendance à vous pousser à couvert et à y rester jusqu’à ce que le ménage soit fait, cette fois ce n’est plus possible. Les rejetons vous fonceront dessus en nombre, bondissant sur les murs pour mieux éviter vos balles, les fauves se jeteront sur vous pour vous plaquer au sol et les écumeurs viendront carrément vous gober pour vous amener dans leur tanière si vos coéquipiers ne les arrêtent pas avant. Bref, côté bestiaire, The Coallition a choisi de s’inscrire dans la continuité en reprenant les excellentes bases de la première trilogie, en y apportant leur petite touche personnelle sans dénaturer l’ensemble. Une vraie réussite donc.
C’est d’autant plus réussi que l’I.A. est particulièrement soignée, ce qui me semble être un atout indéniable de nos jours, alors que les ennemis se contentent généralement du minimum syndical dans la plupart des FPS/TPS. Ici, ils n’hésitent pas à profiter de leur surnombre pour vous submerger, notamment en vous contournant. Ils savent également battre en retraite lorsqu’ils se sentent trop menacés et ramperont vers leurs compagnons une fois blessés. Il reste certes quelques comportement parfois étranges, mais dans l’ensemble ce qui est proposé est plutôt intéressant et cohérent. Il en va de même d’ailleurs pour l’I.A. alliée, qui sera pourtant souvent à la traîne lors des séquences pacifiques, mais tout de suite beaucoup plus concernée et agressive une fois en combat. Tout ça contribue à renforcer l’immersion du joueur sur le champ de bataille. On regrettera toutefois quelques redondances servant au remplissage d’une campagne un poil courte, comme ces séquences de mini-mode horde (avec son nouvel habillage Tower Defense) bien trop utilisé et réutilisé tout au long de l’aventure.
Lèche vitrine
Et dans le genre séquence redondante, comment ne pas parler de ces innombrables scènes d’ouverture de porte et de désobstruction du chemin ? Ces actions sont tellement répétées à outrance durant toute la campagne, qu’on en finit par se demander si Gears 4 n’est finalement pas qu’une simulation de serrurier. Après, si ça permet d’éviter les temps de chargements entre les différentes aires de jeu, ce n’est pas plus mal. Car côté technique, si l’épisode n’est peut-être plus la vitrine qu’étaient ses aînés, il reste tout de même sacrément joli à regarder et jamais pris à défaut sur la fluidité de l’action. Plus coloré que les épisodes passés, ce Gears 4 flatte la rétine par son architecture et son level design, même si certains intérieurs peu inspirés ternissent le tableau. C’est surtout lors du déchaînement des tempêtes, que ça soit les « simples » rafales de vent ou les innombrables éclairs de foudre martelant le sol, que l’esthétisme du jeu vous frappe au visage. Dommage qu’elles ne soient pas plus nombreuses et/ou longues, se contentant de quelques apparitions bien scriptées à certains moments clés.
La bande son n’est pas en reste, notamment les voix françaises plutôt réussies et, bien entendu, le doux son des armes qui chantent au rythme des batailles. Notez d’ailleurs que tout l’arsenal des épisodes passés est de retour, auquel s’ajoutent quelques jolies trouvailles comme cette scie circulaire prompte à décapiter vos adversaires. Bon, personnellement j’aurais fait toute l’aventure ou presque avec le tandem Lanzor/Destructor, mais c’est mon côté conservateur qui veut ça. Enfin, un dernier mot sur le scénario qui, sans casser trois pattes à un canard et jouer à fond la carte de l’originalité, reste suffisamment efficace pour nous faire tenir le pad en mains jusqu’au générique de fin. Malheureusement, j’espère que vous aimez les histoires qui ne finissent pas, car ne comptez pas avoir toutes les réponses à vos questions dans cet épisode, qui finit clairement sur un to be continued…