Lost Odyssey : C’est dans les vieux bocaux…

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Après le semi-échec de Blue Dragon, Sakaguchi récidive avec Lost Odyssey, un RPG plus mature mais toujours aussi classique… peut-être d’avantage même. Faut-il pour autant lui en tenir rigueur ?

Le RPG arrive à maturité

On dira bien ce qu’on veut, mais faut avouer que c’est la sacré classe d’être un immortel. Et ce n’est pas Khaïm, le héros de Lost Odyssey, qui me fera mentir. En effet, alors qu’une gigantesque météorite inonde le champ de bataille de lave incandescente, Khaïm s’en sort vivant sans l’ombre d’une égratignure. Mais bon, être immortel n’a pas que des avantages. Le premier inconvénient, c’est que tu te sens incroyablement seul. Le second, c’est que Khaïm a complètement perdu la mémoire ; un problème qu’il partage d’ailleurs avec Satie, immortelle elle aussi et pirate de son état.Peu importe cette amnésie, ce que Khaïm sait, c’est qu’il doit énormément à Gongora, le grand sorcier d’Uhra, conseiller du président, récemment élu à la tête du royaume suite à la chute de la monarchie. C’est sous sa tutelle que vous êtes envoyé pour enquêter sur les événements se déroulant autour du sceptre magique, une gigantesque tour censée offrir un pouvoir magique sans borne au royaume d’Uhra.

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Car dans l’univers heroïc fantasy de Lost Odyssey, la magie côtoie les armes de mêlée, tranchantes ou contendantes. S’il est relativement classique, cet univers qui nous est dépeint ici n’en est pas moins passionnant, se parant d’un background politique étoffé. D’un point de vue général, le scénario est également plus mature que ne l’étaient ceux de Blue Dragon ou d’Eternal Sonata, et ne cesse de s’approfondir et nous placer dans des situations excitantes et originales au fur et à mesure que les quatre DVD prennent place dans le lecteur de la console (surtout à partir du troisième). Les environnements visités sont pour souvent grandiose, notamment les villes qui offrent chacune un design différent des plus impressionnant. Le charisme des personnages principaux est également indéniable, même si Jansen, le comique de la bande, peut parfois nous taper sur le système. Enfin, un excellent point pour le bestiaire qui est, à mon sens, l’un des meilleurs qu’il m’ait été donné de voir dans un RPG depuis très longtemps, avec des créatures originales, variées et parfois très impressionnantes.

Plein les yeux, plein les oreilles

Esthétiquement, Lost Odyssey tire pleinement parti du moteur Unreal Engine 3. Certaines textures laissent à désirer, mais dans l’ensemble le titre se place dans la moyenne supérieure des productions actuelles. Les scènes cinématiques sont magnifiques et de nombreuses cutscenes usant du moteur du jeu viennent alimenter l’histoire par de nombreux dialogues. Il est à noter que la localisation est d’ailleurs tout à fait honnête, avec des doublages en français relativement convaincant et surtout la possibilité de passer à tout moment en anglais, japonais ou même allemand si le cœur vous en dit. Et si les voix sont agréablement surprenantes, ce n’est rien comparé à l’extraordinaire qualité des musiques du jeu. Composées par Nobuo Uematsu, également auteur des musiques des Final Fantasy, les thèmes audibles au cours de l’aventure varient en fonction de chaque situation et renforcent les sentiments éprouvés. Certes, quelques rares morceaux sont plutôt moyens, mais dans l’ensemble ils en imposent et forcent le respect.

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Cependant, cette qualité visuelle et phonique, Lost Odyssey la paie très cher, avec tout d’abord un total de quatre DVD pour faire tenir l’ensemble du jeu. Un point qui nous fera regretter que Microsoft n’ait pas adopté une stratégie similaire à Sony en incluant à sa console un lecteur de haute capacité. Ceci étant, il se passera bien une dizaine d’heures minimum avant chaque changement de galette, du coup cela s’avère moins gênant qu’on aurait pu le penser. L’autre problème, c’est ces multiples accès disque qui font que le jeu ne cesse de charger cinq à dix secondes entre chaque séquence ou à chaque fois qu’on pénètre dans un bâtiment. Là encore, on aurait préféré faire sans, mais au final on finit par s’y habituer et à moins râler au fil des heures qui passent.

Tradition nippone

Mais malgré un scenario béton et une réalisation des plus agréables, Lost Odyssey est loin d’être un jeu destiné a tous les types de joueurs. En effet, fort de l’expérience de son créateur, Sakaguchi (à qui l’on doit les Final Fantasy et autres Chrono Trigger), Lost Odyssey entre dans la grande lignée des jeux de rôles japonais pur jus, avec des ennemis apparaissant de façon aléatoires et des combats se déroulant au tour par tour. Pourtant, malgré tout, le titre de Mistwalker offre quelques variations dans ce gameplay du fond des âges qui en améliorent alors les mécanismes. Ainsi, les ennemis n’apparaissent pas aussi souvent que dans Enchanted Arms (également sorti sur 360) par exemple.

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Cela est essentiellement du au fait que chaque niveau est cappé ; c’est-à-dire qu’il y a un seuil limite pour chacun des donjons que vous traverserez, histoire d’éviter que les joueurs s’amusent à tourner en rond pour accumuler de l’expérience et ainsi se débarrasser aisément du boss suivant. Cela se traduit donc par des apparitions d’ennemis plus rares en fonction de votre niveau et un gain d’expérience qui a tendance à se minimiser. Cela peut sans doute frustrer le joueur désireux d’atteindre rapidement des niveaux de puissance indécents, mais offre alors un challenge véritable avec des combats contre des boss qui s’avèreront très relevé et demanderont aux joueurs de faire preuve de discernement, de coordination et de stratégie.

Le revers de l’immortalité

Un autre point essentiel du gameplay réside dans le simple fait que quelques immortels joindront votre groupe au cours de l’aventure (il commence même avec deux immortels et un humain : Khaïm, Satie et Jansen). Ces immortels ne peuvent pas mourir et si leurs PV tombent à zéro en plein combat, ils se relèveront après quelques tours. Seulement pour cela il faut qu’un membre soit encore debout, car s’il s’avérait que tous vos combattants soient inconscients, vous ne pourriez éviter le GameOver. De plus, les immortels ne peuvent pas s’aguerrir naturellement et ne pourront donc pas apprendre de nouvelles compétences de façon aussi naturelle que les humains. Pour cela, ils vont devoir créer des liens de compétences avec leurs homologues mortels afin de pouvoir apprendre de nouvelles capacités. Dès lors, il devient indispensable de créer une équipe homogène entre humains et immortels et même d’alterner entre les différents membres du groupe lorsque celui-ci dépasse le nombre maximum autorisé en combat (cinq).

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Par la suite, les affrontements aussi dérogent quelque peu aux règles ancestrales établies par le genre. Cela commence par la formation de votre équipe, composée de cinq membres maximum, que vous placez sur deux lignes avant et arrière. Ainsi, les membres placés en retrait seront protégé par ce que le jeu appelle la « CG » (Condition de Garde), qui correspond en fait à une sorte de mur défensif basé sur le total de points de vie des membres de la ligne avant. A l’aide de différents sorts ou altération de vos armes, vous pourrez alors augmenter ou réduire les CG alliées et ennemies et ainsi pouvoir attaquer plus efficacement les ennemis les plus éloignés ; d’autant plus que ceux-ci s’avèrent être souvent les adversaires les plus stratégiques, capable d’invoquer de nouveaux ennemis, de guérir leurs alliés, etc.

Le seigneur des anneaux

Mais la caractéristiques la plus flagrante des combats de Lost Odyssey, c’est l’utilisation d’anneaux magiques que vous trouverez ou créerez vous-même et possédant diverses propriétés. Montés sur vos armes, ces anneaux permettent de modifier vos attaques au corps à corps, en y ajoutant des dégâts élémentaires, en absorbant des points de vie ou de mana ou en insufflant une altération du type terreur, poison, pétrification, et autres classiques du genre. Une fois montées sur vos armes, ces anneaux déclenchent alors une sorte de mini-jeu à chaque fois que vous attaquez au corps à corps. A la manière d’un Elite Beat Agents sur Nintendo DS (de toute évidence le jeu ayant eu le plus d’influence sur les productions de tous bords ces dernières années), ce mini-jeu réside en une épreuve de synchronisation entre deux cercles, l’un fixe et l’autre rétrécissant au fil des secondes.

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Bref, bourré de petites subtilités qui le démarque des autres rpg japonais, armé d’une réalisation exceptionnelle et d’un scénario moins nunuche que ce que les nippons ont l’habitude de nous pondre, Lost Odyssey est bien un jeu de rôle de premier plan qui tient toutes ses promesses. Cependant, si vous êtes réfractaire au tour par tour, il n’y a que très peu de chances que vous ne vous en lassiez pas rapidement ; mieux vaut donc pour vous que vous l’évitiez. Les autres devraient trouver leur bonheur, même si quelques passages laborieux et une linéarité sans doute trop prononcée atténueront peut-être l’enthousiasme des moins passionnés.

Bien plus riche et mature que Blue Dragon, Lost Odyssey est un excellent RPG japonais, dans la plus pure tradition du genre. Mais mieux vaut aimer le tour par tour et les combats aléatoires et fermer les yeux sur sa trop grande linéarité.

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