Dungeon Siege III, le hack’n slash au féminin

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Après une longue période d’hibernation, le hack’n slash n’en finit plus de multiplier ses représentants sous l’impulsion d’un nouveau Diablo en préparation.

Seconde zone

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Tout commence par un incendie.
Après KotOR2, Nevewinter Nights 2 ou Fallout New Vegas, Obsidian Entertainment nous offre à nouveau la suite d’une licence qui ne leur appartient pas. Pourtant, pour une fois ils ont sans doute pu appréhender son développement avec sérénité. Car, même si la série Dungeon Siege est une vieille licence du hack’n slash, on ne peut pas dire que les attentes de sa communauté soient les mêmes que pour KotOR ou Neverwinter Nights. D’ailleurs, à bien y réfléchir, on ne peut pas vraiment dire qu’il existe une communauté Dungeon Siege, tous juste ses fans doivent se compter sur les doigts d’une main de manchot. Certes, le premier épisode est un classique et le second, bien que très décrié par les joueurs et la critique, était plutôt sympathique. Mais, soyons honnête, il n’y a guère de quoi attiser les passions. Et du coup, c’est presque une surprise de voir cette IP renaître de ses cendres après tant d’années d’absence. Oui presque, car il faut bien avouer qu’avec l’arrivée prochaine de la superstar Diablo III, c’est le genre lui-même qui semble renaitre. Et avant même la sortie du titre de Blizzard, la concurrence s’active et les représentants affluent ; de Dungeon Siege à Torchlight, en passant par le récemment annoncé Crimson Alliance et sans doute quelques autres qui me sont sortis de l’esprit.

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Les combats sont très dynamiques et plus subtils qu’à l’accoutumée.
Bref, tout ça sent la récupération marketing à plein nez, histoire de faire parler du bébé. Mais qu’importe le flacon, pourvu qu’on ait l’ivresse dit le proverbe… encore faut-il avoir l’ivresse. Car de prime abord, Dungeon Siege III n’a pas l’air d’être ce titre enivrant qu’on aurait tant voulu. D’abord parce que c’est Obsidian et, qu’après quelques années à suivre l’actualité du jeu vidéo, nul n’ignore que ce studio fait plus partie des seconds couteaux incapables de rendre une copie parfaite que des cadors de l’industrie. Ensuite, parce que techniquement, le titre n’a rien de très renversant… En un mot comme en cent : Ce n’est pas dégeu, mais on a vu mieux. Cependant, si Obsidian n’est pas foutu de développer un vrai gros jeu maitrisé de bout en bout, c’est un studio dont les productions valent généralement le coup d’œil, car à défaut d’être soignées et carrées, elles regorgent souvent de bonnes idées… mal maitrisées certes, mais bonnes tout de même. Du coup, c’est avec curiosité et une pointe de mélancolie nostalgique que je me suis lancé à l’aventure.

Féminisme

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Le jeu n’est pas forcément le plus beau de cette génération, mais quelques effets sympatoches lui confèrent un aspect visuel plaisant.
Et la première bonne surprise, c’est que contrairement à bon nombre de hack’n slash (entre 99 et 100% je pense), Dungeon Siege III offre un scénario. Oui je sais, c’est hallucinant et vous ne me croyez pas, mais c’est pourtant vrai. Le jeu nous conte en effet l’histoire d’une guerre séculaire entre une certaine Jeyne Kassynder et la Légion, un ordre politico-militaire déchu suite à la mort du roi qui leur serait imputée. Vous êtes l’un ou l’une des derniers représentants de cette Légion, dont le peu de membres qui subsistaient encore viennent d’être anéantis dans l’incendie de leur manoir-refuge. En compagnie des survivants (qui se comptent sur les doigts d’une main), vous allez défier la belle, charismatique et impitoyable Jeyne, pour rétablir la vérité et recouvrer votre honneur. Vous traverserez ainsi un royaume en proie aux doutes, aux conflits et aux légendes. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que dans cet univers, la place de la femme est prépondérante. Au-delà des clichés de la guerrière aux gros seins, le jeu fait la part belle aux femmes, qu’il s’agisse des deux héroïnes qu’il est possible d’incarner (deux héroïnes et deux héros), de Jeyne Kassynder, la grande « méchante » de l’histoire ou de quelques-uns de ses sbires dotés d’un vagin, qui ne manqueront pas de vous barrer le chemin. Autant être clair tout de suite, les réfractaires aux grands discours qui pensaient s’en tirer avec un bon vieux hack’n slash bien bourrin qui ne s’embarrasse pas de blabla risquent de rapidement déchanter, tant le jeu est ponctué de dialogues.

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Certaines conversations vous proposeront des choix qui auront, plus tard, des répercussions plus ou moins importantes.
Et cette histoire savamment orchestrée est pour beaucoup dans l’immersion, et suscite l’envie de poursuivre l’aventure à chaque nouvelle rencontre. D’autant plus que les dialogues vous laisseront souvent des choix à faire, dont les conséquences se répercuteront sur la suite de l’histoire. Mieux encore, on a le droit ici à une VF de qualité (dans l’ensemble) même si, encore une fois, on déplorera l’absence d’une version originale. Toutefois, comme il s’agit d’Obsidian, vous vous attendez à y trouver un vice caché. Et vous allez vite l’identifier (en même temps il n’était pas si bien caché que ça) puisque ces dialogues feront sans doute date pour être parmi ceux les moins bien mis en scène de cette génération, tant les personnages sont rigides et inexpressifs. Les développeurs ne se sont même pas cassés le cul à essayer d’animer les personnages avec des gestes complètement hors de propos. Non, ils nous gratifient juste de piquets bougeant les lèvres de façon désynchronisée. Dommage également qu’ils aient voulu nous pondre un système à la Mass Effect, permettant de sélectionner sa réponse avant la fin de la phrase de son interlocuteur. Parce que malheureusement, sélectionner la réponse coupera automatiquement la parole aux autres protagonistes, gâchant ainsi tout le dynamise que cette mécanique de jeu était censée proposer.

Tout en subtilité

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Ceux-là ont une belle tête de con, mais au moins ils sont originaux.
C’est un peu le même constat de gâchis lorsqu’on considère le level design, avec ses environnements relativement variés à l’ambiance parfois envoûtante, plombé par un effet couloir bien trop prononcé. Fort heureusement, de nombreux embranchements et les multiples quêtes annexes sauront casser un peu la relative linéarité du soft. Mais le mal est fait, et c’est d’autant plus dommage que le titre s’articule autour d’un gameplay solide, plus subtile que dans la majorité des jeux du genre. En effet, là où on nous a accoutumé à affronter des hordes déferlantes d’ennemis jusqu’à en saturer l’écran, Dungeon Siege III pari plutôt sur des multitudes de petits groupes successifs, dont la plupart sont suffisamment balèzes pour envoyer les héros un peu trop bourrins bouffer des pissenlits par la racine. Du coup, il faut faire preuve d’un minimum de sens tactique, pour mettre à profit les capacités de chacun et constamment jongler avec les armes de corps à corps, de distance et les différentes techniques de combat et autres sorts qui vont bien. De plus, avec un bestiaire suffisamment fourni et parfois très original (comme ces monstres humanoïdes qui font penser aux poiscailles des grandes profondeurs), il n’y a jamais vraiment de monotonie qui s’installe.

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A l’arrivée, vous pourrez investir dans une petite dizaine de compétences, aux effets variés.
Ajoutez à cela quatre personnages jouables très différents les uns des autres, avec pour chacun un arbre de compétences actives et passives pas forcément très fourni, mais généralement judicieux et intéressant, et vous obtenez un titre qui, sans laisser un souvenir impérissable et flirter avec le panthéon du genre, se laisse jouer sans retenue. Un peu à l’image de toutes les productions d’Obsidian donc, Dungeon Siege III est un jeu bancal, mal maitrisé et manquant cruellement d’ambition, qui arrive toutefois à nous scotcher au pad grâce à son univers, son histoire et ses bonnes idées. Le genre de titre idéal pour occuper un été traditionnellement pauvre en sorties d’envergure. Enfin, a noter quand même que DSIII peut se parcourir en coopération, mais qu’encore une fois, les développeurs ont tellement fait n’importe quoi en codant avec leurs pieds, qu’il est impossible de jouer la campagne en ligne ; à savoir que seul le joueur qui héberge la partie gagnera en XP, armes et compétences, pendant que les coéquipiers devront se refaire intégralement la campagne de leur côté, avec un personnage plus vierge qu’une fan de Justin Bieber. A croire qu’ils le font exprès de se gâcher l’existence, ces cons.

A l’image de ses prédécesseurs, Dungeon Siege III est un bon petit hack’n slash qui remplit parfaitement son office, à savoir nous divertir sans qu’on ait besoin de se forcer. Mais si vous attendiez la nouvelle référence du genre, c’est raté.

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