Hier sortait dans nos salles françaises le dernier film de Tarantino en date : « The Hateful Eight » ou « Les 8 salopards« . Que s’est-il passé depuis le leak de son script ? Le film y est-il fidèle ?
Il y a deux ans, le script du « prochain film de Quentin Tarantino » filtrait sur internet. Souvenez-vous, je vous en ai fait un compte rendu. A cette époque l’audace du réalisateur était assez admirable, étant donné que son scénario avait filtré il refusait de le tourner et souhaitait partir sur un autre film. A peine quelques semaines plus tard il changera pourtant d’avis, sûrement convaincu par ses proches et par la lecture publique du script avec le casting qu’il imaginait pour le film, au théâtre, tranquille.
De prime abord j’ai regretté ce choix que je trouvais moins couillu de sa part (The Hateful Eight aurait pu rester le film de Tarantino dont seul le script est sorti, ça a un côté classe et collector), mais après tout un bon film de Tarantino ne se refuse pas. Et à la vue du scénario à l’époque ça sentait plutôt bon, chose confirmée à ma sortie de la salle de ciné hier soir. The Hateful Eight est un très bon Tarantino dont la réalisation et le jeu des acteurs vient sublimer un script qui était déjà pétri de qualités.
Globalement, le film dans son état final est fidèle au fameux premier jet du script, jusque dans le chapitrage. Il y a bien quelques scènes qui différent un peu (la toute fin notamment), quelques dialogues un peu modifiés ou des personnages un peu changés (le Français est devenu Mexicain), voire le casting souhaité de l’époque qui a bougé (Madsen est resté dans l’équipe mais n’incarne pas John Ruth qui est interprété au final par Kurt Russel). Mais d’une manière générale, de la douche de sang à la pipe du Sudiste en passant par le running-gag de la porte, tout est là. L’esprit Tarantinesque définitivement présent avec son comique de situation, ses effets spéciaux à l’ancienne, son gore, ses dialogues ciselés, sa narration déstructurée (que je croyais définitivement abandonnée depuis ses derniers films), sa bande originale parfaite (Ennio Morricone sur la totalité du film cette fois), ses références au cinéma de genre innombrables… Et comme pour Django Unchained on a même une valeur historique crue et donc rare concernant les Etats-Unis qui se refusent assez souvent à admettre avoir été construits sur un racisme constant.
Et QT s’affirme – une fois de plus – comme un auteur esthète en ayant tourné en un 70mm (ce qui rend hommage aux paysages naturels magnifiques du long métrage) que l’on aurait sûrement pris pour prétentieux chez quelqu’un d’autre. Mais son amour du cinéma de genre dépasse tout, sa pellicule est donc celle des westerns d’époque et c’est pour servir son film, pas une prétention. Certes en France, le film est quasi uniquement « retoqué » et en un seul pan (seule une salle parisienne, et pour 15 jours seulement, le diffuse directement en 70mm, en deux parties, avec entracte et confiseries, et 8 minutes de métrage en plus) mais tout de même. A noter que dans la version que la plupart du commun des mortels verront en France, l’entracte n’est pas mais est ressenti et narré dans le film qui signale ce fameux quart d’heure de pause de façon amusante.
Sur un plan plus personnel, The Hateful Eight m’aura enfin fait apprécier Walton Goggins (Mannix), acteur déjà aperçu chez Tarantino dans Django Unchained (le réalisateur a d’ailleurs bien évidemment repris quelques habitués de plus ou moins longue date comme Samuel L. Jackson, Kurt Russel, Tim Roth, Michael Madsen ou encore Zoe Bell, pour des personnages presque tous cultes à chaque fois) mais surtout second couteau de luxe dans l’excellente série The Shield. Ce mec est un super acteur mais il joue toujours des personnages de connards / lâches / tête à claque (rayez la mention inutile) qui me poussent à le détester. Ici si son rôle ne déroge pas à la règle, il a quelques moments de grâce, très drôles. Et puis mention spéciale à Jennifer Jason Leigh, parfaite grimée en une Daisy Domergue qui s’en prend plein la gueule et qui dégage un charisme fou.
En résumé, pendant presque 3 heures de ce huis-clos « Agatha Christiesque » badass ambiance western, on ne se fait pas chier une seule seconde. Alors oui, The Hateful Eight est un grand Tarantino et il aurait été dommage qu’il ne le tourne pas. L’histoire du script leaké ne restera donc plus qu’une anecdote sans importance, et c’est tant mieux.
1 Commentaire
The Hateful Eight, deux ans après le leak du script…
Shane de The Shield (Walton Goggins) ouais il joue un peu toujours des rôles de connard de plouc ricain, mais je l’aime bien moi.