Certains lecteurs seront sans doute ravis d’apprendre que 2 nouveaux albums de la série épique Donjon sont sortis ce mois-ci . Créée en 1998, la série qui compte plus de 35 tomes n’est toujours pas achevée. Il fallait bien 2 tomes d’un coup pour contenter l’attente !
L’histoire & la genèse

Donjon, série BD d’heroic-fantasy créée par Joann Sfar et Lewis Trondheim publiée chez Delcourt, retrace la vie d’une entreprise pas comme les autres : le fonctionnement d’un donjon où le patron est un mystérieux Gardien, les employés sont des monstres et le chiffre d’affaires le nombre d’aventuriers occis cherchant gloire et trésors dans les sinueux corridors en pierre de cette étrange bâtisse.
Marvin, humanoïde draconique, prend en amitié et sous son aile Herbert, un canard un peu mauviette qui porte une étrange épée. Nulle en apparence, elle fait partie du set d’objets du Destin qui, une fois au complet, rend surpuissant son possesseur. L’histoire, à travers une impressionnante galerie de personnages, nous raconte avec un humour décalé leurs rocambolesques aventures.
Le pari de cette série est ambitieux pour ne pas dire herculéen : faire le récit d’une saga à différentes époques (passé, présent, futur, respectivement les collections Donjon Potron-Minet, Donjon Zenith et Donjon Crépuscule) ainsi que des spin-offs et standalones avec Donjon Monsters et Donjon Parade. Un véritable Marvel Cinematic Universe avant l’heure, en version BD française !

Cette comparaison avec le MCU vaut pour les personnages, mais aussi pour les nombreux auteurs de la génération des années 2000 qui ont apporté leur petite pierre à l’édifice. Parmi eux Larcenet, Kerascoët, Blain, Killofer, Blutch, Alfred, Manu, Mazan, et récemment Boulet et Panaccione pour les deux tomes qui viennent de paraitre.
Le dessin change toujours mais l’univers global, avec ses personnages principaux et ses codes, reste facilement identifiable. Tous les dessinateurs doivent conserver le style naïf de Trondheim pour ne pas faire de grand écart figuratif et maintenir une certaine cohérence graphique. Ainsi ce n’est jamais tout à fait pareil mais tout demeure familier : un renouvellement constant qui permet au lecteur de ne jamais complètement s’habituer à cet univers loufoque et étrange qu’il redécouvre à chaque fois. C’est sans conteste l’une des grandes richesses de la saga en plus d’être une spécificité dans le paysage bédéesque français.
L’armée du Crâne
Premier tome de la nouvelle sous-série Antipodes, l’action se déroule 10.000 ans avant le tome 1 de Donjon Zenith ! La BD s’ouvre sur un affrontement sanglant entre Orcs et Elfes. Mais ce ne sont pas ces deux races iconiques du genre qui vont tenir le haut de l’affiche bien longtemps…mais leurs chiens ! Après la mort de leurs maitres respectifs, une forme de solidarité nait entre les canidés pour tenter de survivre dans ce monde hostile et brutal. Les deux chiens que tout semble opposer vont finalement s’allier et former les deux premiers membres de la faction éponyme pour nous proposer, je l’espère, des moments grandioses et épiques ! Ce numéro est globalement assez gore et violent : massacres, meurtres sanguinolents, morsures et étripages, le tout porté par des dessins colorés et des protagonistes attachants qui forment un cocktail détonnant qui sans nul doute, fera le sel de la série à cette époque barbare.
Hors des remparts
Dans ce 7e tome de la série consacré à l’intrigue du présent, on retrouve Marvin et Herbert qui tentent de sauver le Donjon de leurs occupants illégitimes. Au cours de cette aventure, Herbert pense découvrir l’intention cachée du Gardien à propos du sauvetage du Donjon tandis que Marvin formalise ses voeux de fiançailles avec sa congénère draconique Pirzuine.
Après plusieurs d’années d’attente, les auteurs savent faire plaisir à leurs fans en distillant les ingrédients qui font la saveur nostalgique de la série. Dans South Park par exemple, on guette toujours le moment où Kenny va mourir. Dans Donjon il y a plusieurs traditions qui ravissent les fans et dont ils ne se lassent jamais. Parmi celles-ci il y a le fameux TONG DEUM de Marvin, technique draconique ancestrale dévastatrice, ou encore l’activation magique de l’épée de Herbert qui, lorsqu’elle est touchée par quelqu’un d’autre que lui, fait apparaitre un ancien porteur. Bien souvent, ce dernier est un adversaire redoutable (sauf Isidore le palefrenier, les vrais savent) qui déglingue en deux coups de cuiller à pot les ennemis imprudents.


Conclusion
Ce n’est pas tant la destination qui compte dans un voyage que le chemin parcouru. Dans Donjon, peu importe véritablement la progression de l’intrigue centrale : ce sont les personnages et leurs interactions au quotidien qui font le charme de la série, un peu comme dans Kaamelott. Ces oeuvres génèrent un paradoxe auprès de leurs audiences : elles attendent avec impatience le dénouement de l’histoire en même temps qu’elles redoutent le « The End » et de n’avoir plus rien à se mettre sous la dent. De ce côté-là, les auteurs de Donjon ont prévu une bonne marge avec Antipodes -10000 et Antipodes +10000 ! Maintenant il n’y a plus qu’à remplir entre les deux dates avec un rythme régulier de parutions pour éviter la frustration des lecteurs !
1 Commentaire
J’adore cette BD sur plusieurs époques !