Proposer un jeu sur Fritz BAUER, le procureur allemand qui a dénoncé les crimes commis par les nazis et initié le procès d’Auschwitz en 1963, c’est le pari osé de Paintbucket Games.
Bon ok, mon titre est peut-être un poil désinvolte et prend avec trop de légèreté toute cette histoire de crimes nazis sur lesquels nous allons être amené à enquêter, afin de traduire en justice leurs auteurs. Mais en vrai, si on enlève le côté absurde on n’en est pas si loin (et les graphismes colorés, le charadesign manga, les personnages ridicules et les dialogues débiles… bon ok ça fait beaucoup). Comme dans le jeu de Capcom, nous incarnons un avocat (ici un procureur) enquêtant sur une affaire criminelle, devant apporter toutes les preuves nécessaires au tribunal pour convaincre un juge de ses affirmations.

On incarne donc Esther Katz, une jeune procureure fraîchement sortie des bancs de l’école, rejoignant la tant décriée équipe de Fritz BAUER pour chasser les nazis et les condamner pour leurs crimes. Alors dit comme ça on s’attend à confronter Goebbels à la barre, mais en vrai il s’agira plutôt de « petites » affaires de crimes communs perpétués sous le regime nazi; tirées d’ailleurs de véritables enquêtes historique. Et si la première concerne directement des soldats nazis, la deuxième met en accusation des policiers allemands et des civils. On est donc loin d’Auschwitz… Et oui, vous avez bien lu : Il n’y a que deux affaires à traiter dans ce jeu, pour grosso modo 10h de jeu. En soi, 10h pour 15€ c’est plutôt acceptable, mais on ne peut s’empêcher d’être frustré quand le générique de fin tombe, tant on aurait aimé continuer. Et c’est d’autant plus vrai que le dénouement est un peu trop abrupt et nous laisse clairement sur notre faim. Mais bref, revenons au début…

L’histoire débute donc lorsque Esther Katz débarque pour son premier jour au cabinet de Fritz BAUER, à Frankfurt en 1956. Son histoire personnelle, loin d’être dénuée d’intérêt d’ailleurs, nous sera retranscrite en parallèle de nos enquêtes, par le biais de conversation téléphoniques et de quelques flashback. Pour mener à bien ses enquêtes, notre jeune procureure pourra compter sur l’aide de ses collègues, Paula FISCHER l’assistante juridique pour commencer, Fritz BAUER a qui il faudra rendre des comptes bien évidemment, mais également Christoph WOHLMUTH et Simon PETERS, les deux autres procureurs du cabinet qui ne manqueront pas de vous expliquer les ficelles du métier.


Votre première enquête est celle d’un homme âgé retrouvé mort dans la forêt, abattu froidement d’une balle dans la tête après avoir été enlevé par des agents du NSPD pour interrogatoire. D’après les conclusions de la première enquête, il aurait été exécuté pour trahison selon les règles dictées par la loi de l’époque, mais sa veuve est persuadée du contraire et fait appel à vous pour faire toute la lumière sur cette affaire. Celle-ci va tourner autour de trois axes distincts : L’analyse de photo et documents pour commencer, car ce sont eux qui vont vous permettre de prouver vos allégations. L’audition des témoins, au moyens d’une séquence de reconstitution sous forme de flashback. Et enfin le procès des principaux accusés, où il vous sera demandé d’exposer votre théorie et d’apporter les preuves afin de l’appuyer.

L’audition des témoins occupera la majeure partie de votre temps ; c’est aussi la plus originale des mécaniques de ce jeu. En effet, cet interrogatoire se déroule par le biais d’un flashback, raconté par le témoin et au cours duquel vous allez pouvoir intervenir pour poser toutes les questions possibles ou pour relever et confronter les contradictions du récit. Ce flashback est une séquence interactive dans un environnement 3D, où il vous sera possible de vous déplacer afin de mieux analyser la situation et poser les bonnes questions. Par exemple, en inspectant une pièce vous tombez sur un cadre au mur illustrant une famille heureuse. Celui-ci vous permettra alors de poser une question relative à cette famille. Bref, il n’est pas ici question de dénicher des preuves planquées dans le décor, mais de vous appuyer sur ces éléments interactifs pour poser des questions pertinentes qui feront avancer l’enquête. Très réussie, cette séquence a des faux airs d’Obra Dinn, pour celles et ceux qui auraient testé ce formidable jeu, en clairement moins casse-tête par contre.


Une fois tous les témoins auditionnés, il est temps d’appuyer votre théorie en retraçant les événements sur un plan de la scène, et en répondant à 5 questions qui définiront l’innocence ou la culpabilité de chacun des prévenus. Dès lors que vous serez prête, vous prendrez la direction du tribunal et y exposerez au juge votre vision des faits. Bien évidemment, à chacune de vos affirmations les avocats de la défense ne manqueront pas d’objecter, et le juge attendra de vous que vous présentiez un ensemble de trois preuves concordantes pour appuyer vos dires. Malheureusement, le jeu est parfois un peu trop rigide durant cette séquence, et si vous ne choisissez pas exactement les trois preuves nécessaires, le juge considérera que vous avez échoué alors que les éléments que vous avez sélectionné mènent peu ou proue aux même déductions que les preuves « officielles ». Mais rassurez-vous, le jeu fonctionne avec un système de « vies » qui vous permettront de présenter de nouvelles preuves après chaque échec ; vous aurez même droit à un nouvel indice après chaque raté. Pour le coup, il devient vraiment difficile de se planter, et le véritable enjeu sera alors une sorte de challenge avec vous-même, pour obtenir le meilleur score possible au debrief.

Sans doute un poil court, ou plutôt frustrant par son faible nombre d’enquête je dirais, The Darkest Files est aussi bourré de fautes d’orthographe, ou sans doute plus de frappe, ainsi que quelques errances dans la traduction (« after the bombing » traduit par « après l’attentat » plutôt que « après le bombardement » par exemple). Toutefois, le jeu n’en reste pas moins une petite pépite pour les fans de jeux d’enquête. Le thème résolument sombre et adulte, ne bascule jamais dans le pathos ou le sensationnalisme puisqu’on reste sur des « petits » crimes. Bien évidemment, le nazisme, les déportations, les exécutions ou encore Auschwitz, sont là en filigrane pour nous rappeler à quel point cet épisode de notre histoire a été particulièrement dur et dramatique. Une leçon qu’on devrait d’ailleurs toujours garder à l’esprit, car comme le disait Fritz BAUER himself, « rien n’appartient au passé, tout est encore présent et peut à nouveau devenir futur. » Et malheureusement, ça n’a jamais été aussi vrai… poke Trump & Netanyahou !
Jeu mis en whislist Steam au lendemain du trailer Gamescom, soldé dans les deux heures qui ont suivi. Pour une fois, j’ai donc acheté un jeu en soldes…