Cloud Gaming, bienvenue en 1997 ?

0

Le Cloud Gaming fait penser aux débuts du streaming vidéo, époque Real Player de 1997 en 240×180. Son avenir sera-t-il le même que celui de la vidéo ? Pas forcément.

On aime bien s’engueuler à la rédac’, avec toute la mauvaise bonne foi des fanboys, cela occupe une bonne partie de nos échanges. Entre les pro PlayStation et pro Xbox, pro iPhone et pro Android, pro Mac et pro PC, on pourrait dérouler à l’infini nos sujets de discussion récurrents.

Le Cloud Gaming, on te dit que c’est le futur !

Il y en a un qui revient de temps en temps, mais qui est un peu moins conflictuel car je suis quasi le seul détracteur, le jeu en streaming. Quand ils m’opposent le futur, le sens de l’histoire (arguments définitifs qui les fait passer pour des visionnaires et moi pour un vieux con) ou la simplicité du Cloud Gaming, je leur réponds tout un tas de raisons plus ou moins techniques, mais surtout, je l’ai testé et ça ne fait pas rêver.

Même avec nos liaisons fibrées de citadins, la compression du cloud gaming fait revenir une ou deux Gen en arrière, époque PS3/360. Adieu la 4K pour laquelle on a acheté des télés OLED avec plein d’acronymes de frimeurs, HDR, VRR, ALLM… Comme on pouvait le craindre, la latence est mauvaise, même sur de petits jeux solos le temps de réaction n’est pas très agréable. Si ça arrivait en local, on le critiquerait sans cesse, alors pourquoi s’imposer ça avec le Cloud ? On me répond que ça va s’améliorer, que la compression va évoluer, sans doute, mais nos consoles vont aussi continuer à s’améliorer et il y aura toujours un net décalage entre les deux technos.

Somerville et sa bouillie de pixels

Coté prix du cloud, les acteurs sont aujourd’hui en phase d’expansion prédatrice, ils se moquent de perdre de l’argent. Chez Microsoft et son Xbox Cloud Gaming, la différence entre le Game Pass normal et le Ultimate avec cloud est de 3€ par mois, ils ne peuvent évidemment rentabiliser les infrastructures. On me répondra que tout est mutualisé, que tout le monde ne joue pas aux mêmes heures et que les coûts sont partagés par les différents clients. Mais que se passera-t-il quand tous ces clients voudront jouer en même temps pile le jour de la sortie du dernier Fifa ou CallOf ? Un beau message d’attente ?

Tsokoa a voulu tester sur sa télé

Et enfin, pourquoi voudrions-nous absolument basculer en Cloud Gaming ? Alors que toute la rédac’ joue avec des consoles ou des PC aujourd’hui ? Pour ceux qui veulent leur jeu Day one, sans attendre plus de 5 minutes, le démat est déjà là (c’est aussi un autre sujet infini entre nous, Dématérialisé vs Physique, et le Cloud Gaming pose les mêmes problèmes de non possession des jeux).

Et je n’aborde pas les problèmes écologiques du streaming, je vous conseille d’ailleurs Frankenstream sur Arte.tv. S’il y avait encore besoin d’un élément pour convaincre de l’inutilité tout ça.

Dans la réalité…

Malgré mes réticences, j’ai tout de même testé. Pour ne pas mourir trop con, mais surtout pour jouer à Somerville qui est une exclu Xbox et qui me tentait vraiment. Passé l’enthousiasme des premières minutes de jeu, où l’ambiance est plus forte que les défauts, apparaît la triste réalité de la compression qui bouffe tous les détails. La réalisation sombre, dans des nuances de gris, n’est pas vraiment compatible avec la compression. Le coté plateforme avec des petites énigmes, où tout élément du décor est important, n’est pas non plus compatible avec la compression. Chaque «niveau» semble bien moins fluide et naturel qu’en jouant en 4K (ou même Full HD), il faut bien plus scruter l’image pour trouver ce qui est important dans la bouillie de pixels.

Un zoom sur un détail du jeu, à gauche en 4K, à droite en Cloud. Vous voyez le levier à actionner ?

Pour vérifier que ce n’était pas ma liaison qui provoquait tout ça, j’ai testé aussi au boulot un midi, avec du débit à ne plus savoir qu’en faire, c’était la même chose. Et enfin, pour voir un autre jeu, autant tester celui qui est pour le moment le plus beau de la next-gen, A Plague Tale: Requiem. C’est mieux que Somerville, mais ça reste très très brouillon dans les détails, ça semble cependant être jouable, comme un jeu PS3. Ce n’est plus bienvenue en 1997, mais bienvenue en 2006…

Un deuxième avis de Tsokoa pour un peu de bonne foi

Histoire d’apporter un peu de bonne foi et pour le plaisir de contredire Smy, je viens à la rescousse donner de l’équilibre à cert article un peu à charge. Le jeu vidéo via le Cloud est en effet un sujet récurrent de bataille entre nous. Face aux diatribes de Smy sur Whatsapp bien content de nous envoyer les captures les plus dégueulasses possibles de Somerville, mon esprit de contradiction (et mon espoir d’un futur entièrement dématerialisé où nous télechargerons nos consciences dans des crystaux neuronaux à bord d’une sphère de Dyson constituée d’essaims de vaisseaux intelligents en orbite proche du soleil) m’ont naturellement poussé à lui opposer moults arguments théoriques. Mais l’arrivée de l’application Xbox Cloud Gaming sur ma TV Samsung m’a donné l’occasion de tester in-situ.

Bizarrement High on Life bien que beaucoup plus complexe rend vachement mieux que Somerville (ps: désolé pour les photos, c’était pour une conv’ Whatsapp à la base et pas pour un article)

Etant sans doute l’une des personnes les plus honnêtes du monde, je n’ai pu qu’observer un résultat assez décevant sur Somerville. Et je ne parle pas là de l’approche trop point’n click du jeu qui fait effectivement très 1997, mais bien de l’aspect graphique en version Cloud avec de grosses bavures à l’écran dès qu’il y a des dégradés de couleur et/ou de lumière assez prononcés, les passages avec moins de dégradés restant eux relativement clean bien qu’avec une résolution basse pour une TV 4K.

Mon côté journaliste d’investigation et surtout la frustration d’être globalement d’accord avec Smy m’ont quand même poussé à aller chercher un peu plus loin. J’ai donc décidé de tester un autre jeu et devant le catalogue du Gamepass, mon choix s’est porté sur High on Life qui me faisait de l’œil en fan de Rick & Morty, de SF et d’humour de merde. Et là j’ai un peu eu l’impression de ne plus jouer avec la même plateforme. Assez bizarrement j’avais l’impression de passer d’un jeu Switch qui n’arrivait pas à tourner correctement à un jeu quasi next-gen qui ronronnait sans souci. Bon pour être totalement honnête (je vous l’avais dit), la résolution limitée sur l’écran se ressent de même qu’une certaine simplification des textures et des couleurs, mais tout reste fluide et l’image assez propre à des années lumière du rendu de réunion Zoom foireuse de Somerville. Pour être encore totalement honnête (désolé je suis comme ça), j’ai eu les jours suivants un certain nombre de micro baisses de qualité sur 2-3 secondes comme si le fantôme de Somerville tentait de hacker ma session.

Ne voulant pas juger une plateforme ou un pan entier de l’industrie sur un ou deux jeux, j’ai aussi testé quelques autres jeux et observé des rendus assez variables entre un Halo Infinite fluide mais avec pas mal de moments où le rendu bave à un Forza Horizon 5 qui m’a le plus impressionné par l’absence d’artefacts à l’écran malgré la vitesse impressionnante. Un constat assez paradoxal qu’un Forza à 200 à l’heure rende bien mieux qu’un Somerville avec ses plans fixes ou quasi, un paradoxe j’imagine dû aux techniques de compression encore imparfaites de la plateforme.

Tu joues à Forza Horizon 5 sur PS5 ?! Non j’y joue sur ma TV Samsung

Le Cloud Gaming n’est sans doute pas encore une technologie ou un service totalement mature, mais je ne peux que me sentir hypé en jouant sur ma TV à une console sans console et en pouvant ainsi tester des jeux que je n’aurais sans doute pas faits sans. Dans un genre un peu différent, je passe aussi une bonne partie de mes heures de jeu vidéo sur FIFA à distance avec Toma21 grâce à la fonctionnalité de la PS5 qui me permet de squatter son jeu et sa console comme si j’étais chez lui (comme si ce con n’avait pas déménagé). Ces situations illustrent pour moi le mouvement vers la dématérialisation et l’ubiquité auxquels le stream apporte une réponse. Et pourtant ces situations ne sont même pas forcément les plus représentatives et conseillées, le jeu streamé étant surement plus adapté pour le moment sur des appareils mobiles. Smy s’est visiblement senti comme en 1997 en jouant à la Xbox via le Cloud et moi aussi en fait. Je me rappelle en effets des premiers jeux 3D de la seconde moitié des 90’s avec un nombre de polygones qu’on pouvait compter sur les doigts d’une main pour avoir aujourd’hui des jeux plus aboutis en temps réel que les cinématiques précalculées de cette époque de l’internet en 33k où l’on osait même pas rêver de streamer un film. Le jeu vidéo via le Cloud m’apparait comme une nouvelle frontière, le Xbox Cloud Gaming encore imparfait étant d’ailleurs en Bêta et je trouve qu’il y a plutôt matière à se réjouir et à espérer son évolution.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *