Maniac Mansion, Secret of Monkey Island, DeathSpank… Ce mois-ci on parle jeux vidéo avec une légende.
« Parlons jeux vidéo avec… » est un concept d’entretiens un peu particulier puisque si les créateurs de jeux vidéo qui y répondent changent, les questions, elles, ne changent pas. Tournant autour du média jeu vidéo et non pas autour d’un jeu en particulier, le but de ces questions est de cerner la vision des créateurs et de les comparer. C’est en quelque sorte un témoignage de ce que le jeu vidéo était, est, et de ce qu’il peut être amené à devenir selon ceux qui les font.
Sur Polygamer on se pose plein de questions vis-à-vis du jeu vidéo, par exemple comment tu expliques qu’il arrive à nous angoisser, nous stresser, nous faire réfléchir (à des énigmes surtout), nous injecter de l’adrénaline, mais qu’il nous fait rarement rire et pour ainsi dire jamais pleurer ?
Pour deux raisons. D’abord en tant que forme d’art le jeu vidéo est encore en pleine enfance. Il y a beaucoup de choses que nous avons encore à apprendre sur la gestion des émotions et leur élaboration à partir du joueur. Toutes les histoires autour d’un conflit par exemple. Les choses que nous avons apprises au lycée à propos de l’homme contre l’homme, l’homme contre la nature et l’homme contre lui-même sont toutes vraies. Malheureusement la forme la plus simple de la représentation d’un conflit est d’en dépeindre la violence. C’est aller directement à l’émotion. Lorsque nous serons matures en tant que forme d’art, nous apprendrons comment réaliser les autres formes d’émotions avec subtilité et profondeur.
La seconde raison a trait au média en lui-même dans le sens où il demande de l’engagement. Regarder un film ou lire un livre est une expérience relaxante et hypnotique. C’est facile pour le spectateur de se laisser aller. Dans les jeux nous sommes constamment en train de demander au spectateur (joueur) de rester engagé et de ne pas décrocher. S’ils le font ils sont directement punis par le fait de perdre la partie. Mais cela fait partie de l’évolution de cette forme d’art. Les jeux dans une centaine d’années seront très différents de ce qu’ils sont aujourd’hui. Les gens du futur se moqueront de nous (si ceux qui ont une machine à voyager dans le temps ne le font pas déjà).
Pour les jeux que j’aime faire, tout vient de la narration et plus spécifiquement, tout vient des personnages. Si tu vas rire ou pleurer, c’est parce que tu as fait attention à l’humain, on adore se soucier d’autres êtres humains, et aussi des chiots tout mignons.
Je l’aurais refusé. Je ferais un Gears of War horrible et les fans me détesteraient. Maintenant si j’avais le budget d’un Gears of War, ça serait amusant de jouer avec le style narratif d’un jeu d’aventure, mais dans un monde entièrement en 3D et de redéfinir ce qu’est le jeu d’aventure/puzzle.
Imaginons que je sois bien placé chez Nintendo (ouais je sais, je suis apprécié chez beaucoup de monde), j’te file la tête du développement du prochain Zelda, t’es libre à 100%. T’en fais quoi et pourquoi ?
J’engage immédiatement Shigeru Miyamoto pour concevoir le jeu.
Le sexe dans le jeu vidéo, ça sera possible un jour en occident ? (J’entends par là des jeux à caractère sexuel commercialisés strictement pour les adultes évidemment, non pas quelconque rapports bizarres avec ta console…. Ma question au-delà d’être lubrique ou ludique penche surtout à te faire causer censure et histoires uniquement pour adultes dans un jeu vidéo…)
As-tu des frustrations en tant que créateur de jeux vidéo ? Lesquelles ? Pourquoi ?
Je suis frustré de la façon dont sont abusés les créatifs et les techniciens dans cette industrie. Je ne parle pas d’heures supplémentaires, je parle du fait que les exécutifs obtiennent toutes les récompenses du dur travail que font les gens qui créés et font ce que les jeux sont. C’est une industrie pesant plusieurs milliards de dollars et nous n’avons pas de modèle pour les royalties ou les « backend » (ndlr : Sortes d’équivalents des droits d’auteur dans l’industrie de la musique ou de la littérature par exemple.) pour les gens qui créés les jeux. Tout va aux types en costumes.
Faire des jeux vidéo, c’était mieux avant ?
C’était différent. C’était plus « l’Ouest sauvage » à l’époque. Il n’y avait pas de règles et c’était fun de les faire évoluer comme on voulait. Aujourd’hui c’est plus une mentalité d’entreprise et ça peut être assez décourageant, sans âme. On a tous les mauvais côtés d’Hollywood mais pas un seul des bons côtés.
Ceci dit j’aime bien l’iPhone et l’iPad. Il y a énormément de créativité sur ces plateformes et avec de petites équipes. C’est comme au bon vieux temps.
A l’époque où je bossais chez Lucasfilm, j’avais l’idée d’un jeu appelé « Commit the Perfect Murder ». Tu prenais le rôle d’un meurtrier et tu devais assassiner quelqu’un sans te faire attraper. La première moitié du jeu tu planifiais et exécutais ton crime. Dans la seconde moitié du jeu tu avais affaire à un détective qui tentait de résoudre ce crime. Tu avais à répondre à toutes ses questions en espérant ne pas laisser le moindre indice. C’était une ambiance très Arabesque (Murder, She Wrote en V.O.) avec vous dans le rôle du tueur. Il a été jugé que ce n’était pas un sujet approprié pour un jeu Lucasfilm.
Vis-à-vis de ton expérience, t’aurais quoi à donner comme conseils à un gars qui part de zéro, les poches vides, et qui se lance dans le Game Design avec dans son sac plein d’idées et d’ambition ?
Faites des jeux iPad. Sérieusement. C’est une plate-forme formidable et très accessible pour les débutants (ok, les débutants débrouillards), et vous pouvez être compétitifs sans avoir une équipe nombreuse ou aux poches bien remplies. Les gens disent que le marché est trop encombré, mais je ne suis pas d’accord. Il suffit de faire un bon jeu et d’en faire la promotion, et ça peut très bien marcher. La plupart des gens oublie la partie « faire un bon jeu ».
Je joue beaucoup à World of Warcraft. Il est pas mal décrié mais c’est un jeu brillamment conçu. Je m’émerveille devant le travail qu’ils ont fait. Il devrait être décortiqué pour tous les game designers.
Pour te poser au moins une question un peu plus classique : Parle nous de tes projets à venir et/ou des idées que tu aimerais explorer, lâches toi.
Je ne peux vraiment pas parler de mon prochain jeu pour le moment. Pas parce que je me le suis interdit, mais parce que comme tous mes jeux, il viendra à moi tout seul une nuit sous la forme d’un rêve.
3 Commentaires
Parlons jeux vidéo avec… Ron Gilbert
Je cherche à comprendre…Où est la chemise à carreau??
Parlons jeux vidéo avec… Ron Gilbert
A lignes, c’est bon, on va pas chipoter pour une chemise.
Parlons jeux vidéo avec… Ron Gilbert
Ron Gilbert joue à WoW, c’est tout ce que je retiendrai 😀