Alexis Le Dressay, co-fondateur d’Eugen Systems, s’est prêté à son tour à notre petit débat sur la création de jeux vidéo, entre deux sessions de développement de R.U.S.E.…
« Parlons jeux vidéo avec… » est un concept d’entretiens un peu particulier puisque si les créateurs de jeux vidéo qui y répondent changent, les questions, elles, ne changent pas. Tournant autour du média jeu vidéo et non pas autour d’un jeu en particulier, le but de ces questions est de cerner la vision des créateurs et de les comparer. C’est en quelque sorte un témoignage de ce que le jeu vidéo était, est, et de ce qu’il peut être amené à devenir selon ceux qui les font.
Un commentaire à faire ou quelque chose à ajouter au sujet du texte de ta biographie polygamerisée ?
Trois erreurs se sont glissées dans cette biographie. Toujours en quête de vérité, allons chers lecteurs, rétablir les faits…
«Alexis Le Dressay a fait des études d’ingénieur». Vrai ou faux ? La réponse est évidemment… Faux. Alexis Le Dressay a fait des études d’architecture. C’est Cédric qui est l’ingénieur. (Nd K.mi : Ouais mais aussi vous faites chier à avoir le même nom les deux frères là, aussi, quand même, après je confond tout alors c’est pas d’ma faute… Ok j’ai honte.)
« Eugen« : Dès la création d’Eugen, nous avons pensé à la pérennité de la société dans 99 ans. Les prénoms ont un cycle de vie bien à eux. Ringard maintenant, ultra tendance dans 60 ans. Eugen est résolument tourné vers l’avenir. Kevin Systems ça assure grave maintenant mais dans 20 ans ? Plus sérieusement, notre petite sœur s’appelle Eugénie.
Voilà, les choses sont en ordre maintenant.
Sur Polygamer on se pose plein de questions vis-à-vis du jeu vidéo, par exemple comment tu expliques qu’il arrive à nous angoisser, nous stresser, nous faire réfléchir (à des énigmes surtout), nous injecter de l’adrénaline, mais qu’il nous fait rarement rire et pour ainsi dire jamais pleurer ?
Je peux pleurer devant un jeu de stratégie. Par exemple, Times of Conflict m’a fait beaucoup pleurer au moment de sa sortie.
J’inventerais la mécanique ludique du rire et celle de la chiale. Plus tu ris, plus tu gagnes de points. Si tu ne ris pas assez, tu perds et tu retournes au menu principal (où ça crash parce que c’est marrant les écrans de chargement). Attention pas de sauvegarde possible. Donc t’as vraiment intérêt à te marrer sinon game over. Possibilité de rire mitraillette (hinhinhinhin) ou rire niais pris en compte. La mécanique de la chiale c’est presque pareil sauf que je rajoute la possibilité de faire des combos par exemple spams + larmes. Je pense déjà à l’addon avec le rire bergsonien.
Imaginons que je sois bien placé chez Microsoft et Epic, j’te file la tête du développement du prochain Gears of War, t’es libre à 100%. T’en fais quoi et pourquoi ?
J’intègre ma mécanique ludique du rire et je fais tester à bilou.
Imaginons que je sois bien placé chez Nintendo (ouais je sais, je suis apprécié chez beaucoup de monde), j’te file la tête du développement du prochain Zelda, t’es libre à 100%. T’en fais quoi et pourquoi ?
On déconne pas chez Nintendo. Je crois que c’est des mecs super sérieux. J’ai peur que la mécanique du rire, ça ne passe pas… La mécanique de la chiale c’est pas mal (le coup du combos en particulier) mais est ce que c’est très dans l’esprit Zelda ?
Le sexe dans le jeu vidéo, ça sera possible un jour en occident ? (J’entends par là des jeux à caractère sexuel commercialisés strictement pour les adultes évidemment, non pas quelconque rapports bizarres avec ta console…. Ma question au-delà d’être lubrique ou ludique penche surtout à te faire causer censure et histoires uniquement pour adultes dans un jeu vidéo…)
As-tu des frustrations en tant que créateur de jeux vidéo ? Lesquelles ? Pourquoi ?
Je trouve que c’est très long de faire un jeu. J’aurais envie de pouvoir tester des idées plus rapidement. La frustration apparait quand tu ne peux pas faire toi-même les choses ou que les choses que tu aimeras avoir vont prendre un temps trop important.
Faire des jeux vidéo, c’était mieux avant ?
Parles nous d’un ou de plusieurs de tes projets que t’aurais aimé sortir mais que tu n’as pas pu suite aux refus des éditeurs ou autres soucis. Parait que chaque créateur a au moins un projet maudit de ce type dans son baluchon, donc voilà, frustre nous de ne jamais pouvoir y jouer je t’en prie… D’ailleurs avec le recul t’en penses quoi de ce(s) projet(s) qui reste(nt) dans les cartons et de ce qui les y fait rester ?
J’adorerais faire Act of War 2. Je reçois souvent des mails de joueur qui nous supplie de le faire. Malheureusement, la licence ne nous appartient pas, c’est Atari qui a les droits.
Vis-à-vis de ton expérience, t’aurais quoi à donner comme conseils à un gars qui part de zéro, les poches vides, et qui se lance dans le Game Design avec dans son sac plein d’idées et d’ambition ?
Je lui dirais que le métier de game designer est un métier où le travail compte énormément. Les métiers créatifs sont des métiers très exigeants et demandent beaucoup de travail. Il faut donc être passionné pour ne pas s’épuiser ou se décourager. J’encourage les jeunes game designer à se poser la question suivante: Quel est votre type de jeu préféré ? C’est très important car bosser sur un type de jeu qu’on n’aime pas, c’est à la fois une perte de temps et se donner les meilleures chances de faire du boulot de sagouin. Il faut adorer le genre sinon on ment aux joueurs. C’est la première question que je pose à quelqu’un qui postule chez Eugen. Ce qui m’étonne toujours quand il y en a qui me répondent : Je ne joue jamais aux jeux de stratégie…
Je résume, passion + travail. C’est comme ça que le talent se découvre.
Non pas toujours. Il y a des jeux que je n’aime pas forcément auquel je joue parce qu’ils ont un niveau de réalisation qui m’impressionne. Je pense aux blockbusters ou aux éternelles suites auxquelles on a le droit généralement autour de noël. Il y en a d’autres que je n’aime pas, que je teste pour voir à quoi ça ressemble, de comprendre comment autant de joueurs peuvent y jouer et s’y intéresser. Je pense à ces «social games» sur facebook. Ça m’impressionne que de telles merdes puissent attirer autant de monde.
Pour te poser au moins une question un peu plus classique : Parle nous de tes projets à venir et/ou des idées que tu aimerais explorer, lâches toi.
Sinon on travaille sur un autre concept très orienté hardcore qui s’adresse à des fans. C’est assez kiffant de travailler sur ce genre de chose. Parce qu’on n’a pas besoin de faire de concession. C’est un jeu pour fan de… Pareil, je ne peux pas trop en dire. Désolé 🙁
Enfin évidemment j’attends avec impatience la sortie de RUSE et on est complètement en embuscade pour la suite. On a suivi de très près la bêta publique et vu l’engouement et le nombre impressionnant de joueurs (+1.500.000 téléchargements !). On ne va donc pas les trahir en laissant RUSE en plan.
Enfin, que penses-tu de Polygamer ? As-tu des idées pour que l’on s’améliore, des suggestions, des trucs ou des machins ?
Very nice indeed! J’aime beaucoup le ton, je le trouve décomplexé et c’est très bien parce qu’il s’agit de jeux vidéo et que ça doit rester cool. Un grand bravo!
1 Commentaire
Parlons jeux vidéo avec… Alexis Le Dressay
R.U.S.E repoussé pour cause de proximité avec SC2 ?
C’est toujours sympa ces interviews.