Mass Effect Andromeda, mètre étalon du Space Opera

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Cinq ans après le dénouement des aventures du commandant Shepard, le Space Opera de Bioware nous revient avec de nouveaux héros et un nouveau monde à explorer.

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Après Shepard et son crew, une nouvelle génération prend le destin de la galaxie en mains.

Wing Commander, Privateer, Freelancer, Epic ou X-Wing dans une moindre mesure… De tous temps j’ai toujours été un inconditionnel des Space Opera. Avec la trilogie Mass Effect, mes rêves de conquête spatiale les plus fous se sont réalisés et, à ce jour, je considère cette licence comme l’une des meilleures de l’histoire du jeu vidéo. C’est très discutable, pas forcément très objectif non plus, et nombreux sont ceux qui me traiteront de fou en citant des lutins verts à qui l’on donne à tort des prénoms de princesse, des bedonnants en salopette rouge qui gobent des champignons hallucinogènes, ou des asiatiques qui kiffent porter des caisses et chopper au vol des fleurs de cerisier pendant des heures. Mais qu’importe… Ce préambule, c’est surtout pour vous prévenir que, du coup, je risque d’être un peu moins virulent que certains rédacteurs sur d’autres sites. Je pense notamment aux plus aigris. Ceux qui vouent un kult à la critique facile et au mépris qui fait vendre des abonnements premium en jouant sur le buzz, façon Jean-Marc Morandini du jeu vidéo (sans le côté pédophile). Ce n’est pas pour autant que je fermerai les yeux sur les défauts de ce quatrième épisode, loin de là. Et d’autant plus parce que je suis fan, d’ailleurs. Mais que voulez-vous ? Moi, tant qu’on m’emmène dans les étoiles pour pécho de l’alien, je marche.

Nouveau départ

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La galaxie d’Andromède est suffisamment vaste pour vous occuper de nombreuses heures.

La trilogie PS360 étant définitivement close, Andromeda amorce donc une toute nouvelle histoire. On retrouve cet univers de Mass Effect particulièrement riche et complexe, et de nombreux faits datant de l’époque de la première trilogie, nous sont relatés au travers de dialogues et de documents textuels ou audio. On retrouve même quelques références à des personnages marquants (Aaaaaah Liara… cœur avec les doigts !). Cependant, ce nouveau chapitre de la saga débute sur une page quasiment vierge, afin que les néophytes ne se sentent pas lésés par leurs carences scénaristiques. Peut-être même moins que les joueurs de la première heure, d’ailleurs… mais j’y reviendrais. Andromeda débute donc par une sortie de stase, 600 ans après la fin de Mass Effect 3. En effet, peu de temps avant que les Moissonneurs viennent foutre le bronx dans notre galaxie, l’Initiative Andromède semble avoir eu le nez creux en envoyant les principales races de la Voie Lactée à la découverte de la lointaine galaxie d’Andromède. Le but de cette Initiative est alors de coloniser des planètes jugées habitables, baptisées « Mondes en or ». Cet Arche de Noé intergalactique est composée du Nexus, une gigantesque station aux allures de Citadelle, ainsi que de quatre arches indépendantes, abritant les quatre principales races de la Voie Lactée : Hyperion, l’arche humaine. Leusinia, l’arche Asari. Parcéro, l’arche Galarienne. Et enfin Natonos, l’arche Turienne.

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On a vu plus accueillant comme environnement…

A la tête de chacune de ces arches, un Pionnier. Il s’agit d’une sorte d’élu de son peuple, assisté par une Intelligence Artificielle unique en son genre, liée à son corps et à son âme. Son rôle est de guider sa race vers le Monde en Or qui lui a été attribué, afin d’y établir une colonie. Le Pionnier humain se nomme Alec Ryder et la planète qu’il est chargé de coloniser, c’est Habitat-7. Accessoirement, il est également le créateur de SAM, la fameuse Intelligence Artificielle en question. Vous, vous incarnez son fils ou sa fille, selon le genre que vous aurez choisi en début de partie. Bien entendu, il ne faut pas sortir de Saint-Cyr pour comprendre qu’il va très vite y avoir une couille dans le space-potage. Dès votre sortie de stase déjà, l’arche Hyperion entre en collision avec un aussi mystérieux que dangereux phénomène flottant dans l’espace : Le fléau. Cet accident a littéralement mis le vaisseau à feu et à sang et votre première tâche, à peine réveillé, sera de colmater les brèches et éteindre les incendies. Y a mieux comme réveil, après 600 ans à ronfler dans une capsule cryo…

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Le Tempest n’a rien à envier au Normandy.

Et pourtant, cet incident n’est rien comparé à ce que la suite vous réserve. En effet, l’Habitat-7 vient d’être déclassé. De « Monde en Or » censé abriter le nouveau berceau de l’humanité, il fait désormais figure de planète hostile, de par son atmosphère particulièrement chargée en électricité. Seulement, après six siècles de route pour arriver jusqu’ici, l’humanité peut difficilement se dire que tant pis, elle fait demi-tour et réclame un remboursement de ses frais, en défonçant le tour opérator sur Trip Advisor. Il faut donc coûte que coûte trouver une solution, en commençant par envoyer une escouade au sol afin de clarifier la situation et estimer les chances de survie dans cet environnement. Et c’est là, alors que tout part en sucette et que vous pensiez avoir touché le fond, que la situation va prendre une tournure encore plus dramatique que je vous laisse le soin de découvrir. Toujours est-il qu’après une relativement longue introduction à l’issue de laquelle on vous confiera un vaisseau et son équipage, vous allez arpenter la galaxie d’Andromède afin de trouver un nouveau foyer pour l’humanité et ses alliés, cartographier une nouvelle galaxie, terraformer des mondes entiers, faire copain-copain avec des autochtones extrêmement méfiants et combattre les salauds de Kerts, des extra-terrestres particulièrement belliqueux, qui feraient passer les Geths de la première trilogie pour des enfants de cœur. Chouette programme !

Grincheux

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Les déplacements à bord du Nomad sont particulièrement plaisants.

Alors oui, vous avez pu lire ces dernières semaines toutes sortes d’articles sur les animations faciales ratées du jeu. Vous avez pu voir bon nombre d’images et de vidéos sur le sujet… un peu toujours les mêmes d’ailleurs. On ne va pas se le cacher, c’est raté. On ne compte plus les mimiques ridicules de notre héros/héroïne et de ses interlocuteurs. Mais franchement, ces quelques errances noyées dans la centaine d’heures et les milliers de lignes de dialogues méritaient-elles de condamner le jeu comme il l’a été ? L’aventure est également truffée de bugs en tous genres. Mais là encore, c’est malheureusement le cas de la très grande majorité (pour ne pas dire totalité) des jeux aussi vastes. De mémoire, les trois premiers épisodes étaient aussi pas mal bugués, et ils n’ont pas été autant raillés. Les voix ne se sont pas non plus élevées aussi fortes lorsqu’il s’agissait de GTA, Watch_Dogs, Assassin’s Creed ou The Witcher 3. Alors pourquoi faire deux poids, deux mesures ? Pourquoi les mêmes qui encensent Horizon : Zero Dawn et son open world à priori très générique (je n’y ai pas joué, je relaie juste les différentes critiques lues), se plaignent de quelques quêtes Fedex dans Andromeda ?

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Toute votre quête tourne autour de la terraformation de planètes hostiles.

Oui, le syndrome Casimir & Besancenot cher à K.mi est très largement d’actualité dans le titre de Bioware. On incarne un Pionnier, censé sauver la galaxie, et pourtant on se fait chier à prendre des nouvelles de la tante de trucmuche ou apporter une fleur à la copine d’untel, comme si on avait une gueule à travailler pour Interflora. Je ne le nie pas. Mais ce sont des pratiques très courantes dans les RPG. Encore une fois, les Fallout et autres Witcher 3 ont aussi usé de ces subterfuges pour faire du remplissage. D’autres vous font chercher des dog tags, des pages de manuscrit et autres collectibles à la con, et c’est à peine évoqué dans leurs critiques, parce que c’est facultatif et que c’est rentré dans les mœurs. D’autant plus que dans Andromeda, si ces quêtes vous saoulent, rien ne vous oblige à les faire. Il y a suffisamment de quoi s’occuper, entre la campagne principale, les caveaux reliquats, les quêtes de loyauté découpées en plusieurs parties et les dizaines d’autres quêtes secondaires bien plus passionnantes que les simples messages à rapporter à l’autre bout de la galaxie qui semblent avoir traumatisé certains rédacteurs. Donc pourquoi s’acharner ainsi ? Comme si Mass Effect devait porter le chapeau de toutes les ficelles tirées par l’industrie depuis des décennies.

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Les Kerts sont une belle bande de connards sordides, intégristes religieux type Daesh ou Civitas.

Il y a toutefois un point sur lequel je rejoins presque ceux qui l’ont critiqué. Il s’agit des choix moraux qui nous sont proposés et qui n’ont pas beaucoup, pour ne pas dire pas du tout d’incidence sur la suite. Après, ces choix moraux ont selon moi surtout une incidence sur votre façon de voir les choses, la façon dont vous façonnez votre avatar. Allez-vous sauver le pionnier d’une autre race, parce qu’il a de grandes responsabilités et qu’il est porteur d’espoir pour toute son espèce ? Ou allez-vous secourir une poignée de Krogans promis à un sort bien pire encore que la mort ? Cette décision n’apportera rien d’autres à votre partie qu’une divergence dans les quelques dialogues qui suivront. Mais qu’importe, l’important c’était de vous avoir confronté à ce choix. De toute façon, si c’est pour finir avec une cinématique finale où seule la couleur des rayons change, est-ce bien grave ? Kotor nous permettait de jouer du côté lumineux toute la partie, puis de choisir le côté obscur avant le combat final. Les jeux Telltale nous font croire qu’on écrit nous-même notre aventure à force de choix forts, en nous amenant pourtant tous au même dénouement. Là encore, les jeux à choix n’ont toujours été que de la poudre aux yeux, et aucun n’a jusqu’ici tenu ses promesses. Andromeda peut-être juste un peu plus que les autres, mais est-ce si important ?

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Grand explorateur

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Peebee est clairement le personnage le plus charismatique et le plus intéressant de l’équipage.

Me concernant en tout cas, ce qui me plait avant tout dans un Space Opera, et à fortiori dans Mass Effect, c’est ce dépaysement inhérent au thème de conquête spatiale. Il n’y a en effet rien de plus grisant à mon sens, que de découvrir de nouveaux mondes, de nouvelles civilisations et voyager aux confins de la galaxie. Et sur ce point, Andromeda fait encore plus fort que ses illustres prédécesseurs, en nous envoyant coloniser des planètes à des milliers d’années lumières, tel un Christophe Colomb de l’espace. Cette sensation de plongée dans l’inconnu y est parfaitement rendue, avec ces doutes survenant à chaque problème rencontré, ou l’excitation croissant au rythme des découvertes et des succès. Parcourir les différentes planètes où la vie a élu domicile est fantastique, notamment grâce au Nomade, le véhicule 6 roues motrices qui renvoie le Mako du premier épisode à la casse. Sa conduite est exemplaire et il rend bien des services lorsqu’il s’agit de crapahuter à la surface, tant les zones proposées sont vastes.

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Le spatio-port de Kadara tranche radicalement avec les autres planètes. Dommage que la ville ne soit pas plus grande…

En effet, chaque planète propose un mini-open world rempli de quêtes, annexes ou principales, avec un paysage qui leur est propre et qui ont tous en commun d’être à couper le souffle. Le relief, le champ de vision, les jeux de lumière et les ambiances vous décrochent la mâchoire à de nombreuses reprises et accentue cette impression d’expédition à la Colomb. Cependant, et hormis peut-être Havarl, la fantaisie n’a rien d’exceptionnelle et Bioware est sans doute resté trop sage, en reprenant des univers classiques comme la planète gelée, la planète désertique, la planète montagneuse, etc. C’est dommage, mais pas forcément dommageable non plus puisque l’aspect sauvage des planètes visitées leur confère ce côté exotique prompt au dépaysement. Le bestiaire me paraît également un peu léger, qu’il s’agisse des ennemis rencontrés ou de la faune locale… forcément hostile d’ailleurs. Je conçois que ces mondes ne puissent être propices à une faune foisonnante, compte tenu de leurs dérèglements climatiques, mais elles manquent tout de même cruellement de vie.

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Mieux vaut être bien préparé et sûr de son fait avant d’affronter un Architecte.

Enfin, il y a cette carte de la galaxie d’Andromède, particulièrement vaste mais bien trop peu interactive. Sur la quarantaine de systèmes proposés, seule une poignée de planète pourra être visitée, sur un total de deux à trois cents. Les autres ne seront là que pour meubler ou au mieux, être scannées pour y déceler des gisements de minéraux. Alors, que les traumatisés du deuxième épisode se rassurent : Ici le scan n’a rien à voir avec la plaie qui nous était proposé autrefois. Les animations des voyages de planète en planète peuvent être zappées et le scan se fait en un clic, ou presque. Ce dernier n’est d’ailleurs pas uniquement cantonné aux planètes, puisque votre omnitech fixé sur votre avant-bras, vous permettra de scanner tout et n’importe quoi dans l’environnement qui vous entoure, à la recherche de nouveaux plans de fabrication ou de points de recherche permettant d’en débloquer. Même le Nomade sera lui aussi équipé d’un scan, afin d’extraire les minéraux des zones les plus riches. Tout cela peut parfois s’avérer rébarbatif, cependant même s’il reste facultatif, il est plus que conseillé d’en abuser afin d’obtenir les ressources nécessaires pour crafter armes et armures.

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DIY

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Le genre de bestioles capable de vous tuer en un coup.

Car en effet, comme beaucoup de RPG de nos jours, s’il est toujours possible d’acheter des armes et de l’équipement dans les boutiques des PNJ qui traînent ça-et-là, il est aussi et surtout possible de tout fabriquer soi-même. Avec les bons plans et les bonnes ressources, on obtient d’ailleurs un arsenal et des armures bien plus efficaces que ce qui est proposé à l’achat. Cela permet même d’orienter son craft vers des items tirant parti des pouvoirs tech ou biotiques, selon l’inclinaison de votre héros/héroïne. Car le profil de votre avatar se construit au gré des compétences acquises tout au long de l’aventure, en dépensant des points dans les nombreux et différents pouvoirs et autres techniques de guerre à disposition. La montée en puissance est d’ailleurs plutôt bien retranscrite, et on finit l’aventure avec une véritable machine de guerre. Il est toutefois dommage que le choix dans les techniques soit quelque peu forcé par le fait que certaines d’entre-elles soient aussi dévastatrices que classieuses. Car oui, vous avez le choix. Mais qui va développer une compétence aussi banale que les grenades frag lorsque, en lieu et place, il peut attirer à lui puis projeter des ennemis dans les airs, tel un jedi qui ferait passer Vador pour un noob ?

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C’est à bord de l’Arche Hyperion que vous assurerez l’avenir de l’humanité.

C’est d’autant plus dommage, que du coup, ce qui est vrai pour Ryder l’est aussi pour ses équipiers. Dès lors, on aura plutôt tendance à s’entourer des plus redoutables ou des plus charismatiques (Peebee, Drax, Cora…), et pas forcément des plus complémentaires. A ce propos, l’équipage du Tempest ne fera sans doute pas oublier les Liara, Garrus, Tali, Joker ou Mordin, mais ils ne déméritent pas forcément pour autant. Pour ma part, je regrette surtout le manque de diversité deses races présentes dans Andromède. Alors pour ce qui est du fait que les Angaras soient la seule espèce intelligente de la galaxie (les Kerts étant des envahisseurs), ça s’explique et même plutôt intelligemment (je vous laisse le soin de le découvrir). Mais j’aurais aimé ne pas avoir à attendre une pauvre ligne de dialogue en toute fin d’histoire pour expliquer l’absence des Elcors, Drells et autres Qariens, même si celle-ci sert à introduire la suite des aventures de Ryder. Un cinquième épisode qu’on n’aura d’ailleurs peut-être jamais puisque la série est mise en pause suite à ses mauvais résultats, tant critiques que commerciaux. C’est bien dommage, car si il n’est certes pas exempt de défauts, Mass Effect Andromeda reste un grand jeu, sans doute même l’un des tous meilleurs de cette génération. Riche, long, prenant, dépaysant comme aucun autre, et au gameplay huilé comme jamais la série n’avait su le faire, il mérite amplement qu’on délaisse la chasse aux dinos mécaniques et autres pitreries du genre, pour aller explorer sa galaxie. De mon côté, je pleure toutes les larmes de mon corps de ne plus pouvoir le faire avant de longues, très longues années.

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